Quand vous voyez des oeuvres de Mr Byste dans la rue, dans les catacombes ou dans son atelier à Ivry-sur-Seine (Val de Marne), vous êtes frappé par le côté méticuleux du graphique. A la fois esthétique et scientifique, le dessin met en valeur nos anatomies et par conséquent, l’animal et la nature. Avec ses jeux de pistes (souterrains et urbains), ses différents formats et matériaux, Mr Byste analyse et construit toutes les possibilités artistiques.

Entretien avec Mr Byste, un artiste-artisan.

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Vous débutez en 2017 dans les catacombes de Paris avec des tracts contenant des labyrinthes et des messages codés. La complexité fait-elle partie de votre identité ?

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J’ai été auparavant ingénieur. Puis, j’ai été profondément déçu par le monde start-up et dans une volonté d’art thérapie, j’ai voulu réaliser un projet qui mêlait art et sciences. J’ai donc dessiné 477 monographies d’insectes. Cela représentait tout l’arbre phylogénétique (l’arbre de l’évolution) des arthropodes des anciens (trilobites) jusqu’aux plus récents (insectes). Une fois imprimées, plastifiées comme des petites cartes à collectionner, j’ai déposé tous ces tracts dans les catacombes. J’imagine qu’il en reste quelques-uns encore cachés. J’ai toujours aimé visiter les lieux que personne ne visite. Je me rendais dans les catacombes seul et pendant des heures. Au total, plus de 2 000 cartes indices ont été cachées. Cette œuvre ARG (alternative reality game) inspirée par “cicada 3301” fut une chasse au trésor avec la possibilité de trouver ; une bouteille de champagne, plusieurs œuvres originales et un jeu de Risk version KTA fait à la main. Malgré la complexité de l’énigme, le trésor a été retrouvé quelques mois plus tard par un cataphile.

Je ne me définis pas comme quelqu’un de complexe mais je suis un artiste qui aime les concepts très étudiés, et l’intellectualisation de l’art.
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D’où vient le nom de Mr Byste ?

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By signifie « par « en anglais. Ste sont les trois premières lettres de mon prénom. J’avais un autre pseudonyme quand je faisais de la bande dessinée à titre amateur. Mr Byste est apparu quand j’ai commencé mon art à plein temps.
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En quoi le chat de Schrödinger vous fascine ?

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Après l’étude des insectes et des arthropodes, j’ai voulu passer de l’exosquelette au squelette. Une exposition a été organisée par le Journal du chat noir à Montmartre. Pour l’occasion, j’ai réalisé un pochoir du petit félin que j’ai diffusé dans les rues. Mais ce chat de Schrödinger était toujours dans la même position. Il manquait de vie…

Fan de stop motion depuis longtemps, je voulais lui donner du mouvement et proposer une nouvelle forme de street art. J’ai donc produit une série de 12 pochoirs décomposant le mouvement de l’animal.

Après le chat, j’ai réalisé le rat, le Némésis du premier. Le cheval puis lapin ont été les suivants car lors de la création des premiers films de cinéma, ils ont été étudiés par Edouard Muybridge (USA) et Etienne-Jules Marey (FR).

Actuellement étudiant au Muséum d’Histoire naturelle, j’étudie le dessin scientifique et le mouvement ostéologique. Même si je n’aime pas trop les étiquettes, j’ai aimé la formule d’un vendeur de bombes peintures qui connaissait mon travail. Il m’a qualifié de Motion vandalist. J’ai toujours aimé voir la rue comme une pellicule.

Je dispose de 12 à 24 pochoirs par animation. Il est difficile d’obtenir à chaque fois l’autorisation de propriétaires de bâtiments. Je m’octroie donc parfois le droit de réaliser une œuvre sur un mur. Mes pochoirs sont dit “monolayers ». Par conséquent, j’ai juste besoin de passer un coup de bombe dessus et le tour est joué. J’aime les surfaces sombres afin de contraster avec le squelette blanc…
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Avez-vous réalisé des œuvres ailleurs qu’à Paris ?

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J’ai réalisé des pochoirs-gendarmes dans le Morvan. J’ai également posé des œuvres dans la région d’Antibes-Cannes. Je ne peux voyager sans mes pochoirs. Dans le train, sur le siège passager d’une voiture, à la plage, au bord de la piscine, je découpe des pochoirs. Les mois d’hiver, je prépare les œuvres. A partir du printemps, je les pose dans la rue.
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Le noir & blanc s’adapte-t-il parfaitement avec la rue ?

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J’ai pris la décision de ne faire quasiment que du noir & blanc. J’ai toujours aimé le côté rétro vintage. Le noir & blanc a cette identité. Je ne cherche pas du tout à avoir un côté morbide. Pour moi, voir l’intérieur des choses est un catalyseur de curiosité

Actuellement, je reprends des photographies de personnalités iconiques telles que Mohammed Ali, Serge Gainsbourg, Donald Trump, Salvador Dali, Jacques Chirac ou encore Grace Kelly. Le squelette est ici secondaire. L’accoutrement ou la pose permettent d’identifier la personnalité. Je travaille actuellement sur une photo du président américain Théodore Roosevelt traversant un fleuve sur le dos d’un élan. Par mon art, je veux faire connaître cette image.
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Le squelette est-il un personnage principal ?

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Oui car c’est une charnière du mouvement.
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Quel est votre rapport avec Instagram ?

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De nombreux artistes choisissent de rester amateurs. Cela veut dire qu’ils font le choix de ne pas présenter leur travail. Avec Instagram, des artistes sont devenus plus professionnels. Par conséquent, c’est un excellent outil. Je me définis comme un artiste urbain – le tag, l’art figuratif, le graffiti sont des arts à part entière. Le street art est selon moi une forme de néo pop art.

Cependant, certains artistes, alors qu’ils n’ont quasiment jamais été dans la rue, se présentent comme des vandales/street artistes afin de construire leur notoriété ce qui me dérange.
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Quels sont vos projets ?

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Je veux continuer à dire oui à toutes les opportunités artistiques qui se présentent. Je suis ouvert à beaucoup de choses. Dès qu’on me propose des expositions collectives, j’y vais. S’il y a des galeristes sérieux, j’étudierais leur proposition. Je tiens à garder mon indépendance.

Je fais également du workshop, des ateliers, des visites de rues, des fresques commissionnées. Je souhaite réaliser de l’art en permanence.
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