Au détour d’une rue de Londres ou de Paris, vous pourrez croiser le regard énigmatique de cet œil si large, si bleu et de cette bouche si voluptueuse. Les œuvres d’Anna Laurini ont envahi l’espace public. Souvent peintes sur du papier à musique, elles donnent même une sonorité douce à la jungle urbaine.
Les couleurs changent parfois, les tailles également mais le regard reste toujours le même.
Entretien avec l’artiste Anna Laurini.
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Vous avez fait des études d’art. Quel type d’étudiante étiez-vous ?
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Je suivais les cours de Central Saint Martins à Londres. J’avais déjà choisi mon propre style artistique et je faisais tout pour l’améliorer. Je ne cherchais pas à apprendre d’autres techniques ou connaître de nouveaux concepts. Je ne cherchais en aucun cas à réinventer la roue. À l’école d’Art Students League de New York, j’ai puisé mon inspiration dans l’histoire de cette académie : le bâtiment, les salles de classe, tout ressemblait exactement à ce que j’imaginais trouver dans une école d’art. J’ai suivi plusieurs cours de dessin d’après modèle vivant et j’ai adoré chaque minute. Les professeurs étaient fantastiques. Ce fut vraiment passionnant.
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Vous êtes-vous inspirée de peintures particulières du mouvement cubiste ou de l’abstrait ?
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Même si je me suis inspirée de ces deux mouvements, je n’ai pas d’œuvres particulières comme étendards.
La façon dont le cubisme déconstruit la forme et l’expressionnisme abstrait capture l’émotion brute résonne fortement en moi. Même si « Les Demoiselles d’Avignon » (1907) de Pablo Picasso et l’énergie chaotique mais contrôlée de Jackson Pollock dans ses peintures sont des exemples qui me parlent, ce sont avant tout les philosophies qui se cachent derrière ces mouvements qui inspirent vraiment mon travail.
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Était-ce une évidence dès le départ d’afficher vos œuvres dans la rue ?
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Pas du tout. C’est venu progressivement et naturellement. J’ai commencé en studio, mais au fil du temps, j’ai découvert que la rue offrait une énergie et une spontanéité uniques. Travailler à l’extérieur a permis à mon art d’interagir directement avec le public et avec l’environnement urbain, ce que je trouve à la fois stimulant et inspirant.
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Quelle est cette élégante figure féminine ?
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C’est un sphinx qui règne sur la jungle urbaine avec grâce. Reflet de l’âme, cette figure nous invite à regarder vers l’intérieur et à explorer les profondeurs de notre propre être. Apparaissant à de nombreux coins de rue, elle tisse un sentiment de magie dans le paysage urbain, nous donnant l’impression d’être toujours au bon endroit au bon moment.
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Aimez-vous créer en extérieur en présence des passants ?
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Oui, j’aime le côté imprévisible de la peinture dans l’espace public. Même si je prends mon temps, l’énergie des passants ajoute quelque chose à l’expérience. Leur présence rend l’acte de création plus vivant. Il est même intéressant de voir en temps réel comment les gens réagissent à l’œuvre.
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Paris est-il un lieu à part pour vous ?
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Paris est une ville incroyablement spéciale pour moi. L’art, l’Histoire et la beauté sont dans chaque coin de rue. La lumière, les rues, l’ambiance… tout à Paris semble être destiné à inspirer les artistes. Je suis constamment attirée par l’esprit créatif et l’énergie intemporelle qui semble circuler dans la ville.
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Vous dessinez parfois sur une feuille de partition de musique. Est-ce que cela donne des impressions sonores ou est-ce juste un joli cadre ?
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C’est un peu des deux. La partition est porteuse d’un rythme et d’un sens de l’harmonie que je trouve puissant. Tout cela m’inspire. Cependant, la feuille sert également de fond texturé et superposé, ajoutant de la profondeur au récit visuel tout en créant un dialogue entre les notes écrites et mes dessins.
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Utilisez-vous des couleurs spécifiques dans certaines occasions ?
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Oui, j’ai un lien profond avec mon bleu-cyan métallique signature. Il a une signification en lien avec mon passé et il donne souvent le ton à mes œuvres. Le reste des couleurs accompagne naturellement le dessin, créant un dialogue au sein de l’ensemble.
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Il y a parfois deux visages ou une poitrine. Cela produit-il une sorte de continuité ?
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Les deux visages représentent souvent la rencontre d’âmes sœurs – une connexion intime entre deux êtres. Les seins, à leur tour, symbolisent une continuité dans leur parcours commun, une unité fluide qui s’approfondit à mesure qu’ils se rapprochent.
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Quels sont vos projets ?
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En ce moment, je m’installe dans un nouvel espace et je me prépare à peindre des toiles plus grandes. C’est une période passionnante et j’ai hâte de voir comment ce nouvel environnement influence mon travail et repousse mes limites artistiques.
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Le site internet d’Anna Laurini : Artworks – ANNA LAURINI