Depuis 1983, Jérôme Mesnager, co-fondateur du mouvement artistique Zig-Zag, s’est accompagné de son fameux homme blanc. De la France à la muraille de Chine, ce personnage a su faire sa place dans la rue mais aussi dans le cœur de toutes les cultures.

40 ans de street art pour cet artiste qui continue à réaliser de nouveaux projets et de nouvelles collaborations.

Entretien-portrait avec Jérôme Mesnager dans son atelier de Montreuil.

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Vous avez été étudiant en arts plastiques, vous deviez être ébéniste, vous avez participé à un projet artistique à l’Eglise des Célestins et vous avez essayé d’être également dessinateur de bandes dessinées. Etait-ce une époque où vous étiez en constante exploration artistique ?

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J’étais guidé par la passion et la curiosité.

Après avoir vu le film « Diva » (1981) de Jean-Jacques Beineix, j’aimais également explorer avec d’autres amis du groupe zig-zag les lieux désaffectés et les catacombes. Nous aimions dessiner dans ces lieux qui nous fascinaient et qui étaient magnifiques.

En 1981, 200 peintres dont les plus connus de l’époque se sont réunis afin de travailler à l’Eglise des Célestins. Nous présentions en même temps notre travail au public.

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En janvier 1983, l’homme blanc naissait il y a maintenant 40 ans. Vous parlez de force, de lumière et de paix. Comment avez-vous eu l’idée de ce personnage ?

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A l’âge de 10 ans, je vivais dans un immeuble où le peintre Jean-Pierre Le Boulc’h vivait au rez-de -chaussée. Il avait pour habitude de présenter ses toiles aux clients dans la cour. Le Boulc’h a été le premier « pochoiriste « de France. Il avait monté une revue où se fréquentaient des artistes comme Ben, Arman, César, Gérard Fromanger et Ernest Pignon-Ernest. J’ai pu présenter mes premiers dessins à Le Boulc’h et puis j’ai pu rencontrer ses compères.

Ben était un artiste facilement identifiable avec des phrases simples. Je voulais également que l’on reconnaisse mon art au premier coup d’œil. J’ai alors eu l’idée de l’homme blanc. Tel un fantôme, il va là où il veut car il est libre.

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Vous avez dessiné l’homme blanc dans le monde entier.

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Dès les premiers mois, il m’a en effet accompagné dans mes voyages notamment en Italie puis en Afrique et l’Asie. Quand je peignais, des passants s’arrêtaient, me regardaient et m’offraient à boire. Avec l’homme blanc, vous n’avez pas besoin de parler une langue – C’est un personnage qui peut être compris par tous. Ma peinture est une lecture universelle : Tout le monde se retrouve dans cet être humain.

Avec mon épouse et un couple d’Italiens que nous venions de rencontrer et après 8 heures de marche, j’ai peint l’homme blanc sur la muraille de Chine.

La reconnaissance est venue assez vite. Les photos ont été diffusées dans beaucoup de journaux. J’ai été invité à la télévision.

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L’homme blanc a-t-il évolué dans le temps ?

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J’ai parfois créé de façon spontanée puis j’ai réalisé des interprétations de peintures célèbres. Avec l’homme blanc, j’ai pu reproduire des œuvres de Renoir, de Rodin, de Michel-Ange ou d’Ingres.

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Est-ce un être de bonheur ?

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Oui. Il vaut mieux garder en mémoire les belles choses. Oublions le négatif. Les couleurs représentent la joie – même le noir.

Lorsque je peins l’homme blanc, il est comme en train de danser. La photo peut parfois montrer le mouvement. Je veux toujours montrer de l’énergie.

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Vous avez également réalisé des plaques Guimard qui étaient présentes dans le métro.

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Guimard m’intéresse dans sa création et son époque (Fin XIXème siècle – début du XXème siècle). J’ai toujours aimé l’art nouveau. Au 70 ans de la mort de Guimard, j’ai récupéré les droits d’Hector Guimard en accord avec la RATP.

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La fresque « C’est nous les gars d’Ménilmontant » est-elle une œuvre à part ?

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Elle compte car l’œuvre reste toujours parmi nous. Le projet a débuté en 1988 et la fresque a été réalisée en 1995. Habitant à l’époque le 20ème arrondissement, j’ai pu choisir le lieu. Le mur faisait figure de porte du quartier de Ménilmontant.

Il s’agissait d’un des premiers lieux parisiens peints.

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Quel souvenir avez-vous de l’artiste Nemo ?

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Il s’agit d’une de mes plus belles rencontres. Nemo était un grand poète de la rue. Il refusait d’intégrer le monde de l’art et avait par conséquent choisi l’espace public comme lieu d’exposition. Nous avons été très amis jusqu’à sa disparition.

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L’homme blanc a aujourd’hui 40 ans. Il ne vous quittera jamais ?

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Jamais. Dès le début, j’avais conscience que nous n’allions jamais nous quitter. L’homme blanc fait partie intégrante de ma vie. Grâce à lui, je suis un patron sans ouvrier et un ouvrier sans patron. Il m’arrive tout de même de m’engueuler quand je n’arrive pas à réaliser à temps (rires).

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Quels sont vos projets ?

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J’expose toujours mes toiles à la Galerie Brugier Rigail à Paris. Je travaille également avec la brillante artiste Adey et Docteur Bergman. J’aime transmettre mes connaissances aux plus jeunes.

J’ai eu la chance d’exposer en début d’année au Musée MAUSA Vauban à Colmar – mon lieu de naissance. On peut également voir mes œuvres à Montpellier en ce moment. Pour les 40 ans de l’homme blanc, je sors 2 livres.

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Photos : © Brieuc CUDENNEC

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