Animateur et illustrateur dans le monde du jeu vidéo, Yannick Corboz est aussi dessinateur de bandes dessinées depuis le début des années 2000. En plus, de la série Brigade Verhoeven, il vient de réaliser l’adaptation graphique du roman de Richard Malka, « Le Voleur d’amour » (Editions Glénat – 2024). Véritable épopée de plusieurs siècles entre Venise, Constantinople, Paris, New York, l’histoire-vampire est aussi magnifiquement illustrée à l’aquarelle. De par ses couleurs et son trait magnifique, Yannick Corboz nous interroge sur la part d’ombre et de lumière en chacun de nous.

Jusqu’au 19 avril, il expose une grande partie de ses œuvres à la Galerie Daniel Maghen à Paris.

Entretien avec Yannick Corboz, concepteur d’images.

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La conception de l’image reste-t-elle la même et qu’importe le médium ?

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Ce qui compte avant tout c’est la perception que va avoir le lecteur. Dans le milieu du jeu vidéo, j’étais concepteur graphique. Je modelais l’environnement. Je construisais autour de la vision du directeur artistique. Les jeux Assassin’s Creed demandaient de grandes recherches documentaires et historiques.

Lorsque vous êtes en charge du design, il y a un vrai travail de réflexion et d’équipe. Pour la série Assassin’s Creed, il n’était pas intéressant de n’intégrer qu’une reconstitution historique. Les artistes donnent de l’originalité et un rythme à un univers graphique.

En bande dessinée, face à votre planche de dessin, vous êtes le seul à décider. J’ai aujourd’hui choisi cette orientation.

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Le dessin est-il aussi un voyage ?

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En particulier avec l’aquarelle. Il y a un véritable lâcher-prise. L’écrivain Richard Malka a aimé l’idée que j’adapte son roman « Le Voleur d’amour » en bande dessinée. Tout en restant fidèle au texte, je devais m’approprier son histoire à ma manière. Au moment de l’écriture, Richard s’était inspiré de romans et de films. Je devais procéder de la même façon avec mon dessin.

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L’adaptation illustrée est-elle un exercice difficile ?

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Je suis resté très proche de la narration de Richard. Puis, je me suis interrogé sur la construction du récit. Un ami scénariste, Pascal Bertho, m’a fortement conseillé de scénariser le récit dans son intégralité. J’ai alors écrit toute l’histoire sur papier, Cela m’a permis d’aller plus loin dans la conception graphique et dans la création des images.

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« Le Voleur d’amour » est-il aussi un hommage aux illustrations de conte ?

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Mon travail fait en effet écho aux artistes du passé – notamment les peintres. « Le Voleur d’amour » débute au XVIIIème siècle et se termine au XXème siècle. Je me suis par conséquent inspiré des œuvres de Poussin, de Fragonard, de Delacroix puis des Impressionnistes et de Turner.

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Prenez-vous un grand soin pour la réalisation de la couverture ?

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C’est un travail collaboratif avec l’éditeur. J’aime proposer trois images qui me plaisent puis nous échangeons ensemble. Pour « Le Voleur d’amour », la couverture choisie a connu une évolution. Il y a un jeu avec l’ensemble. A première vue, la main posée sur le visage de cette femme fait partie du même corps. L’idée première était celle-là. Puis lorsque vous voyez l’image dans son ensemble, vous constatez que cette main appartient à quelqu’un d’autre. 

Je cherche pendant longtemps un certain esthétisme. Pour « Le Voleur d’amour », j’ai opté pour une aquarelle japonaise. J’y perds un certain contrôle et c’est très agréable. Pour « Le Voleur d’amour », j’ai laissé volontairement des « défauts ». Cela donne plus de vie au récit.

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Quelles sont les femmes de vos histoires ?

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J’ai toujours aimé dessiner les corps et les expressions féminines. Le narrateur et personnage principal de « Le Voleur d’amour » est fasciné par une femme. Je me suis un moment interrogé sur le fait que Richard Malka avait peut-être lui-même rencontré un grand amour au cours de sa vie. Il n’a pas souhaité me répondre.

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Venise est-il le lieu le plus enchanteur ?

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C’est une ville qui a gardé un certain côté médiéval. Elle est le reflet de la vie du personnage principal de « Le Voleur d’amour ». Elle dure malgré les siècles qui passent.

J’avais déjà illustré Venise pour « Les Rivières du passé » (2020) mais je n’étais pas allé sur les lieux. J’avais trouvé très facilement de la documentation. Ayant une passion pour les Impressionnistes, j’ai voulu m’échapper du côté réaliste. Pour « Le Voleur d’amour », je me suis rendu à Venise au Printemps. J’ai donné beaucoup de place à mon inconscient. Le Venise du XVIIIème siècle était très probablement moins enchanteur que la cité que j’illustre dans « Le Voleur d’amour ».

Où voulez-vous aller à présent ?

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Je termine actuellement le tome 4 de la série Brigade Verhoeven. J’aimerais ensuite me plonger dans un univers proche du « Le Voleur d’amour » – c’est-à-dire une œuvre qui me fasse plaisir. J’aime avoir une certaine liberté.

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