Modèle pendant plus de 10 ans, Céline Andréa est devenue une photographe précise et singulière. Devant son objectif, le corps est magnifié. Poils, veines et rides, détails si rejetés par notre société, sont même révélés. Présente dans le dernier magazine de Normal (Numéro 16), Céline Andréa prouve à nouveau son talent et sa mise en scène soignée.

Entre les ombres et les lumières, femmes mais aussi hommes sont présentés à la fois de façon brut et élégante. Les corps ont décidemment des histoires à nous raconter.
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Entretien avec Céline Andréa, photographe modèle.


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Qu’avez-vous appris en étant vous-même modèle ?

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J’ai pris conscience que le modèle est un être vivant et non un objet. Tous les photographes semblent ne pas le savoir (rires). Étudiante en histoire de l’art à Aix-en-Provence, j’ai commencé à être modèle nu afin de gagner un peu d’argent.

J’ai appris à aimer mon corps. Les photos de nu m’ont libéré de mes propres complexes. Certains photographes m’ont proposé de faire des images habillées. Je n’ai pas aimé. Alors que le vêtement me limitait, je savais comment m’exprimer avec mon corps dénudé.

La majorité des photographes étant des hommes, on me proposait toujours des poses sexy. Heureusement, le corps nu ne propose pas que cela. Lorsque que j’ai posé pour des photographes femmes, j’ai pu constater que l’on pouvait faire autre chose.
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A quel moment avez-vous décidé de devenir photographe ?

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© Celine Andrea

Le père de mon fils m’avait offert un appareil photo. Je n’étais pas très douée avec l’aspect technique mais j’ai eu envie de relever le défi. Je souhaitais expérimenter la photographie dans des thèmes différents que le nu et le charme (tout ce que je faisais déjà en tant que modèle). Je me suis donc orientée vers le portrait et la mode.

Le fait que j’avais déjà travaillé dans l’univers de la photographie m’a aidée. J’ai pu en parler facilement avec des modèles professionnelles et les projets se réalisaient vite.

Je prenais sans cesse des photos – avec une telle cadence, j’ai pu évoluer. Puis, au fil du temps, j’ai compris que l’univers de la mode ne me plaisait pas. Je suis revenue à la photographie de nu.

Etant une femme, un certain nombre de marques de lingerie m’ont fait confiance. L’univers du charme et du nu se fermait progressivement aux hommes. Il y avait eu trop de révélations et d’agressions. Par chance, j’ai trouvé mon style et ma place rapidement.
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En quoi le modèle féminin est à part selon vous ?

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J’adore les courbes. Il y a tant de possibilités avec le corps d’une femme. Je ne m’ennuie jamais car nous avons des silhouettes si variées et si différentes. J’ai d’ailleurs toujours refusé la standardisation. On véhicule des images qui sont fausses ou trop restreintes. Il y a une multitude de corps et c’est une richesse.
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© Celine Andrea

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Est-ce le don d’une certaine intimité et donc d’un secret ?

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J’adore photographier des femmes qui ne sont pas modèles. Beaucoup ont dépassé la quarantaine. En voyant mes images, elles redécouvrent leur corps. C’est une joie de les valoriser. Chacun d’entre nous a des atouts.
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Le corps est-il une pâte à modeler ? Veines, poils, vergetures, tâches, grains de beauté… Qu’est-ce qui vous intéresse le plus ?
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Étudiante en histoire de l’art, je me suis passionnée pour les différentes possibilités d’expressions. Cela m’a permis d’enrichir ma vision de photographe.

Je suis connue pour être celle qui aime ce que les artistes-hommes n’apprécient pas (rires). A titre d’exemple, j’adore prendre en photo les poils. Malheureusement, c’est toujours difficile de trouver les modèles non épilées. Pour travailler avec moi, certaines filles prennent la décision de laisser pousser leurs poils !
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© Celine Andrea

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La lingerie doit-elle s’adapter au corps ?

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Absolument. J’aurai toujours une préférence pour le corps plutôt que l’habit.

Je suis moi-même une grande collectionneuse de lingerie. J’aime travailler avec de petites entreprises afin de les mettre en valeur. Je regrette qu’un grand nombre d’elles doivent s’arrêter. Beaucoup font un travail fantastique.
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Des échanges et des réflexions ont-ils été nécessaires pour certaines sessions ?

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Lorsque je shoote, je dirige. Quand on pose pour moi, cela veut dire que l’on me fait confiance. Parfois, certaines modèles expérimentées me proposent des poses. Je les écoute. J’aime les poses bizarres. Elles sont bien plus intéressantes que le sexy traditionnel.

Quand tout se passe bien, une session peut durer seulement 30 minutes.
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© Celine Andrea

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Que révèlent les autoportraits ?

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Quand je travaille, je suis rapide. Faire de l’autoportrait, c’est gagner du temps. Cependant, l’exercice commence à me lasser. Si au bout de 5 minutes, je comprends que cela ne marche pas, j’arrête. La photographie doit tout de suite me plaire.
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Quels sont vos projets ?

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Lors du Salon de la Photo, le photographe Christophe Brachet m’a proposé de l’accompagner sur les plateaux de cinéma. Je réalise actuellement des portraits d’acteurs. J’ai pu ainsi rencontrer Vincent Elbaz ou Christophe Héraut. C’est une vraie découverte. Je me suis un peu écarté du nu et cela me fait du bien. Les visages racontent de belles histoires. Avec les hommes, je n’ai pas besoin de retoucher mes photos. Ils acceptent que l’on puisse voir leurs rides ou leurs défauts.
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© Celine Andrea

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Image de couverture : © Céline Andrea

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