Imaginée par le scénariste Xavier Dorison et le dessinateur Félix Delep, la série du Château des animaux a fait son chemin depuis le premier album en 2018. « Le Sang du roi » (Editions Casterman – 2025), vient de sortir. Ce tome 4 conclut de manière surprenante cette série animalière et finalement si proche de notre monde.

Dans une France rurale et abandonnée par les humains, une ferme transformée en château devient le lieu de pouvoir des animaux. Ce temps d’espoir va devenir le lieu de la lutte des pouvoirs.

« Le Sang du roi » termine avec brio cette fantaisie animalière. Le conte prend fin mais les questions demeurent…

Entretien à Saint-Malo avec le dessinateur Félix Delep.

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Pourquoi le dessin animalier est-il aussi fascinant ?

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Je dessine des êtres vivants depuis l’enfance. Pendant mes études, avec les délais serrés, je suis revenu aux animaux car j’avais une facilité à les illustrer. Lewis Trondheim a vu mon travail et m’a proposé d’intégrer Spirou magazine.

Il y a une liberté artistique avec les animaux. De plus, le lecteur est friand de ce genre de lecture. Il est tout à fait possible d’intégrer des aspects humains chez l’animal. Cela par conséquent entraîne beaucoup l’imagination.
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© Casterman

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Comment avez-vous pu vous détacher de « La Ferme des animaux » (1945), chef d’œuvre de George Orwell ?

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Le scénariste Xavier Dorison a été marqué par la lecture de « La Ferme des animaux » – en particulier la fin. En effet, Orwell affirme que toute révolution est vouée à l’échec puisque ceux qui ont été dominés deviendront tôt ou tard des maîtres. Xavier voulait évoquer la désobéissance civile car en Histoire, il y a l’exemple de Gandhi ou de Nelson Mandela qui ont lutté contre les régimes autoritaires et qui les ont vaincus.

Xavier m’a persuadé de réfléchir ensemble à un autre récit animalier.

Le tome 1 du Château des animaux, « Miss Bengalore » (2018) a des similitudes avec « La Ferme des animaux » puis l’histoire s’en détache. Notre série a son originalité et son identité propre.
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Y’a-t-il eu de longues réflexions afin de trouver le bon ton, les bons profils d’animaux ?

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Xavier avait imaginé seul l’histoire. Il me restait avant à réaliser tout le décor et l’aspect physique des animaux. Pour l’héroïne, Miss B, j’avais pensé dessiner une chatte tigrée. Elle est finalement blanche. C’était finalement le bon choix car au fil de l’histoire, nous pouvons constater qu’elle change. Sa couleur également.
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La couverture du « Sang du roi » interpelle. Est-ce un album à part ? Surprenant ?

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Nous avons choisi d’avoir une couverture et un titre sombres. La majorité des pages sont, par contre, plus douces et classiques. Certaines scènes sont violentes voire choquantes. Cela fait donc un beau contraste et un rythme plus agressif.
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Silvio est-il un personnage que vous avez fini par aimer dessiner ?

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Je m’attache à tous mes personnages. Silvio était particulier. Pour le tome 1, j’ai tout fait pour le rendre menaçant. Pour la suite, j’ai rendu Silvio plus grotesque. « Le Sang du roi », étant le dernier épisode, il fallait que ce grand taureau redevienne inquiétant.

Même si avec Xavier, nous n’avions pas pensé à cela au début, Silvio ressemble de plus en plus à Donald Trump. Tous les deux incarnent l’excès et la démesure.

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Dans un monde de plus en plus violent, devons-nous apprendre du passé et du présent afin de mieux avancer ?
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La réalité, en particulier de nos jours, dépasse bien souvent la fiction. Nous vivons dans un monde où tout excès est possible. La désobéissance civique serait bien mise à mal face à la multitude des fake news.

Lorsque je dessinais le tome 2, « Les Marguerites de l’Hiver » (2020), en particulier la scène où Miss B et César dessinent des marguerites dans le Château, le mouvement Extinction rébellion, posait dans les rues de Paris, des affiches et des messages chocs. La bande dessinée rencontrait alors la réalité. Pourtant, Xavier avait écrit le scénario bien avant…  

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Après 8 ans de Château des animaux, que souhaitez-vous à présent explorer ?

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Je ne m’interdis pas de dessiner à nouveau des animaux. Cependant, avec Xavier, nous avons le projet de publier une histoire-fable avec des humains. L’anthropomorphisme est possible. J’ai toujours besoin d’un temps d’adaptation pour trouver le bon ton. A suivre donc…
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