Propulsée dans les années 2000 comme star de la télé réalité avec l’émission Greg le millionnaire, Marjolaine Bui a depuis tracé son chemin. Au revoir les millionnaires, bonjour la vie de mère de famille et la carrière dans l’immobilier. Marjolaine a gardé une indépendance certaine et un caractère bien trempé. On le sait tous : la vie est une jungle.

Entretien avec Marjolaine Bui.

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En 2003, parmi 19 autres participantes, vous êtes remarquée lors de l’émission Greg le Millionnaire. TF1 achète la marque Marjolaine. Peut-on dire que la télé réalité a bouleversé votre vie et même votre vision du monde ?

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En 2003, il n’y avait pas encore d’émission de dating. La télé réalité continuait à susciter de l’intérêt parmi le public. Je participe comme simple prétendante à Greg le Millionnaire. Pendant trois mois, vous devez cumuler les épreuves de casting et vous êtes suivi par des psychologues. Mais, arrivant à la fin du processus, je n’ai pas eu besoin de suivre cette procédure. J’ai juste eu un passage devant une caméra. J’étais libre de faire ce que je voulais. Je suis restée simple : J’ai décidé de ne rien faire, d’attendre. Jeune étudiante au cours Florent, j’avais déjà assez confiance face à une caméra et je pense que cette attitude a plu à la production.  J’ai ensuite un rendez-vous avec Angela Lorente, productrice de l’émission Greg le Millionnaire. Elle m’explique le concept : Un homme riche cherche la femme de sa vie parmi 20 prétendantes sur une île paradisiaque. Je réponds que n’étant âgée que de 21 ans, je ne cherche pas de mari. L’émission pouvait juste me servir pour me faire connaître. Angela Lorente rétorque alors qu’elle cherche justement une jeune fille comme moi. J’ajouterais du piquant à l’émission. J’accepte alors de participer à Greg le Millionnaire.

Nous nous rendons sur l’île d’Ibiza et on nous présente la villa de ce riche célibataire. Une chose me frappe dès le début : je connais ce lieu puisque j’étais venue là pour faire la fête l’été d’avant. Je connaissais le propriétaire, Bruno.

© Marjolaine Bui

Ensuite, nous, prétendantes, avons été présentées à Greg. Je ne l’ai pas reconnu tout de suite. Puis, tout au long de l’émission, en échangeant avec lui, je me suis souvenu de Greg. Je l’avais vu en tant que go go dancer lors d’une soirée parisienne. Pour moi, il ne pouvait pas être millionnaire… Greg a alors pris peur car il était connu à Paris pour être une mauvaise fréquentation. Il m’a renvoyé pour moi l’image d’une femme vénale. Alors que je fais partie des 4 dernières prétendantes, Greg m’élimine du jeu.

Je révèle alors à la production que je ne le connaissais déjà et qu’il n’était pas millionnaire. On me propose alors un deal : je ne révèle rien et une émission me sera consacrée. J’accepte. Avec la télé réalité, une marque est alors apparue : Marjolaine. J’ai alors signé un contrat d’exclusivité avec la chaîne TF1 et j’ai fait la une d’un grand nombre de magazines people. 

Je suis devenue très rapidement l’antagoniste d’une émission inédite en France, Marjolaine & les millionnaires. Une femme avait le choix entre 17 prétendants. Ce n’était plus un homme qui avait « un harem ». Les rôles étaient inversés.

Pendant 10 ans, j’ai été présentatrice d’émissions pour la production pendant 10 ans. C’était un vrai choc car il n’y avait encore que les chaînes hertziennes. La visibilité était énorme. Pour chaque émission de Greg le Millionnaire et de Marjolaine et les millionnaires, il y avait plus de 8 millions de téléspectateurs. Les candidats de la télé réalité étaient les nouvelles stars de l’époque.

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TF1 vous propose en effet Marjolaine et les millionnaires – est-ce avant tout une œuvre de fiction ?

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Ce fut une bonne expérience. Nous avons tourné l’émission à Marrakech. A la fin de l’émission, je choisis l’amour plutôt que le chèque.
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Carré Viiip, Un dîner presque parfait, Next, Mamans et célèbres, vous avez été présentatrice. La télévision est-elle une partie de votre identité (publique) ?

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Pendant plusieurs années, j’ai repris mes études et j’ai fondé ma propre agence immobilière. Devenir chroniqueuse dans TPMP m’a redonné goût à la télévision. Il est évident que tout cela fait partie de ma vie.
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Avez-vous été surprise par l’aura de la célébrité ? Par le regard d’autrui ?

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J’ai marqué une génération. J’étais la première jeune asiatique à être connue avec la télévision. Il y avait chez moi un côté mystérieux qui plaisait. Pour les hommes, j’incarnais un fantasme asiatique tandis que pour les femmes je représentais une certaine émancipation. Il y a 20 ans, les inégalités entre les sexes étaient toujours aussi fortes. Jeune, effrontée, n’ayant peur de rien, j’aimais cet intérêt que l’on portait à moi. Je restais authentique. Nos disputes filmées étaient vraies. Les émissions de télé réalité plus récentes ont des candidats bien plus préparés et plus stratèges. Un grand nombre d’entre eux sont des influenceurs. Dans carré Viiip, j’ai pu voir la différence entre ceux et celles qui étaient des gens ordinaires et les professionnels de l’image.

A présent, mère de famille, cheffe d’entreprise, je suis beaucoup plus posée et sereine. Je garde un souvenir très positif de cette jeunesse sous les projecteurs. J’ai ainsi appris à grandir. 
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© Marjolaine Bui

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Comprenez-vous que le phénomène #Metoo ?

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Dans le milieu de la télévision, de la musique et du cinéma, j’ai pu être témoin de comportements masculins abusifs. Certains hommes m’ont proposé de m’orienter professionnellement tout en assouvissant leurs envies. Intuitive, je décidais de m’éloigner de telles personnalités. J’ai toujours été libre de partir. Le danger fut avec Steven Seagal. Il m’a invitée chez lui afin d’échanger sur le script d’un de ses prochains films. J’ai compris que Seagal voulait plus… J’ai refusé et je suis partie. Par chance, nous n’étions pas seuls dans cette immense maison. 
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Avez-vous été victime des préjugés anti-asiatiques ?

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J’ai la chance de plaire physiquement au public. Dans ce cas, il y a donc moins d’agressivité envers vous. J’ai toujours eu un retour agréable de la part du public. Avec mon identité asiatique, j’ai surtout suscité une part de fantasme chez les hommes comme chez les femmes. Je suis surprise de constater que certains n’hésitent pas à se confier à moi. On me parle comme si on me connaissait depuis toujours.
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Vous avez été multiple. Vous travaillez actuellement dans l’immobilier. Est-ce que cela vous a appris une certaine rigueur ?
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J’ai toujours été sérieuse. J’ai obtenu un BAC S physique-chimie, j’ai fait 5 écoles supérieures et je parle 5 langues. Je suis devenue professeure dans une école privée immobilière. Quand je fais quelque chose je le fais à fond.

Même dans l’univers de la télévision, j’ai été rigoureuse. Peu de gens réussissent dans ce milieu. Le monde de l’immobilier n’est pas une exception. Une grande partie de ma famille travaille dans ce secteur. Dès l’âge de 6 ans, telle une secrétaire, j’écrivais les lettres de réclamation de loyer aux locataires.

© Marjolaine Bui

L’immobilier est dans l’ère du temps et a sa place dans les émissions de télévision. C’est un secteur sûr. Dès que vous obtenez de l’argent, on l’investit dans l’immobilier.

Au fil du temps, j’ai remarqué que lorsque vous achetez votre résidence principale, c’est avant tout un achat coup de cœur. Par conséquent, ce que vous vendez c’est aussi de l’émotionnel. Une maison ou un appartement doit avoir une identité, une histoire et une projection dans le futur. Beaucoup de personnes achètent et imaginent que leurs enfants continueront de vivre dans le même logement.

Ayant une forte expérience dans le monde de la télévision, j’ai pu utiliser la partie émotionnelle en plus de l’aspect technique. Ce fut une façon de se démarquer des autres étudiants. J’ai choisi d’aborder sur la PNL (Programmation Neuro-Linguistique) lors des achats immobiliers. Je suis devenue major de promotion. Il est nécessaire de connaître l’histoire d’un bien ou la vie du quartier.  Un bon agent immobilier doit comprendre les envies des acheteurs.
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Malgré les crises, les guerres, le pessimisme de l’époque, êtes-vous quelqu’un qui soutient le rêve ?

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Il est indispensable de rester positif. Les métiers de l’immobilier nécessitent une grande force mentale. Malgré vos problèmes, vous devez sans cesse rassurer voire convaincre votre interlocuteur. Les relations humaines sont capitales dans tous les domaines. Je m’adapte sans cesse aux personnalités à tel point que l’on me surnomme « la femme caméléon ».

Le cours Florent m’a permis de vaincre ma timidité. De nos jours, je suis déterminée et assurée.   

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Quelles sont vos envies ?

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De mes 20 ans à mes 40 ans, j’avais toujours été matérialiste. Aujourd’hui, je m’oriente vers les fondamentaux du bien-être. J’ai envie d’explorer la médiation, la psychologie, la santé mentale et l’empathie. J’ai envie d’aider.

J’aimerais également réaliser des podcasts love-coaching afin d’aider les couples. Il est toujours important de comprendre l’autre et donc d’échanger et de s’adapter. Cela demande beaucoup de courage et j’aimerais accompagner de tels efforts. 
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© Brieuc Cudennec
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