Seule une poignée de films marque profondément l’histoire du cinéma. Par la mise en scène, le jeu des acteurs ou encore avec une ambiance unique. « Les dents de la mer » (1975) réunit tous ces éléments. Premier blockbuster du cinéma, le film de Spielberg réussit toujours à effrayer les spectateurs presque 50 ans après sa sortie. Le chef décorateur Joe Alves a grandement contribué au succès des « Dents de la mer » en concevant le grand requin blanc, véritable personnage de cette formidable aventure. Alves participera également aux suites (il réalisera même « Les dents de la mer 3-D), à « Rencontres du troisième type » (1977) toujours aux côtés de Steven Spielberg, ou encore à « New York 1997 » (1981) avec John Carpenter. Entretien avec un véritable artiste du cinéma américain.

 

 

Quand avez-vous rejoint l’équipe des « Dents de la mer » ?

 

J’avais rencontré Steven Spielberg lorsque je participais au tournage de la série « Night Gallery ». Nous avons ensuite travaillé sur son premier film « Sugarland Express » (1974). Les producteurs des « Dents de la mer » Richard D. Zanuck et David Brown avaient déjà participé pour le compte d’Universal Pictures à de grands films comme « Butch Cassidy et le Kid » (1969) avec Paul Newman et Robert Redford. Alors que je travaillais sur « Night Gallery », David Browshark1n m’a appelé. Son épouse travaillait pour la rubrique littérature du magazine Cosmopolitan et avait lu un livre sur un requin terrorisant la ville d’Amity. Le roman s’intitulait « Les dents de la mer ». Mme Brown a tout de suite pensé que cela pouvait faire un bon film. David m’a alors demandé de réaliser des illustrations pour un éventuel long métrage. J’en ai réalisé 25 même si je n’ai pas été payé pour cela. Entre temps, j’ai commencé à faire du repérage pour le tournage. Steven n’était pas encore dans le projet. C’est après la réalisation de mes illustrations qu’il a été engagé.

 

 

Quelles furent vos inspirations pour la création des 3 requins mécaniques ?

 

 

Il y a eu une grande réunion avec tout le département (les équipes des effets spéciaux, de communication et de la photographie) dans le bureau du responsable d’Universal, Marshal Green. J’ai fait ma présentation. Dès le départ, Steven et moi-même voulions tourner le film au beau milieu de l’océan et non dans une piscine où l’effet requin aurait été raté. Un tel projet n’avait jamais été encore fait. Nous voulions également un grand requin d’environ 7 mètres de longueur. Les types des effets spéciaux se sont montrés réticents car cela n’avait justement jamais été fait auparavant. Tout aurait pris au moins un an. Marshal s’énerva et déclara en effet que « Les dents de la mer » sera plus gros que « L’Odyssée du Hindenburg ». Tout le monde se mit à rire car ce dernier film avec George C. Scott était considéré comme le film le plus cher. Pour beaucoup, un long métrage avec un requin n’aurait en aucun cas du succès. Qu’importe : Marshal croyait au projet. Alors que je rangeais mes dossiers, il est venu me voir et m’a demandé de construire le requin. J’ai accepté et je suis d’abord allé dans les studios Disney car ils avaient déjà réalisé une baleine. Les techniciens n’ont pas dit non pour faire un requin mais m’ont tout de suite prévenu que c’était impossible de le faire fonctionner dans l’océan. J’ai alors demandé à Joe Lombardi qui avait travaillé sur les effets visuels du « Parrain » (1972). Il m’a dit qu’il était trop occupé pour participer au projet et que tout cela prendrait plus d’un an à réaliser. J’ai également commencé à faire des recherches sur les requins notamment leurs mouvements. Je me suis également inspiré du documentaire australien « Blue Water White Death » (1971). J’ai ensuite rencontré le spécialiste des effets spéciaux Bob Mattey alors à la retraite. Il avait réalisé le calamar géant de « 20 000 lieux sous les mers » (1954). Bob a accepté de m’aider pour la sculpture du requin et plusieurs jours plus tard, il est venu avec une œuvre en fil de fer- c’était les mâchoires de l’animal. J’ai monté une équipe de 7 techniciens que j’ai appelé les « 7 mercenajawjawires ». Nous avons réalisé un modèle de requin blanc d’environ un mètre avec un ichtyologiste de San Francisco, Leonard Compagno. Ensemble, nous avons fait tous les détails du prédateur. Ensuite, nous avons réalisé un requin six fois plus grand (plus de 7 mètres de long). Puis, nous nous sommes rendus compte qu’il fallait créer 3 requins (un plus petit, un qui pouvait nager vers la gauche, et un qui pouvait aller vers la droite). Nous devions avoir également une profondeur d’eau d’environ 8 mètres pour que le requin puisse sortir à la surface. Nous devions de plus trouver un lieu avec une petite marée. Cela voulait dire que nous ne pouvions tourner sur la côte ouest. Il était par contre possible de trouver des zones sur la côte est avec de petites marées. En décembre 1973, j’ai rencontré Peter Benchley, l’auteur du roman « Les dents de la mer ». Avec une carte de la côté est, sans le nom des villes mais avec la profondeur de l’eau et les marées, je lui ai demandé où nous pouvions tourner les scènes avec le requin. Il y avait 2 îles : Martha’s Vineyard et Nantucket (Massachusetts). Peter a suggéré d’aller sur la deuxième île. Il la connaissait car ses parents vivaient là. Mais la mer étant trop houleuse, nous n’avons pas pu atteindre Nantucket. J’ai alors pris un bateau et je suis allé visiter Martha’s Vineyard. J’y ai trouvé un village, une ville et une petite marée. C’était l’endroit parfait pour tourner nos scènes. Un requin pouvait aisément venir et détruire le lieu. J’ai contacté Steven et nous nous sommes organisés.

 

 

Jaws mechanical shark

 

 

Durant le tournage, avez-vous eu de nouvelles idées ?

 

 

En novembre-décembre 1973, nous avons commencé à construire le requin. Nous avions besoin en tout et pour tout d’un an. Mais comme le livre de Peter Benchley devait sortir en février 1974, le studio nous a dit qu’il fallait commencer à tourner dans deux mois. J’ai alors prévenu Steven et les producteurs qu’il nous fallait un an de préparation. Leur idée était de surfer sur la sortie du roman afin de mieux vendre le film. Steven a finalement convaincu le département de nous donner un mois de plus. Nous avons commencé à tourner en mai ce qui était terrible car il faisait toujours aussi froid sur la côte est. De plus, les 3 requins n’étaient pas encore prêts. Nous avons décidé de commencer à tourner sans eux. Nous utilisions par exemple les barils pour suggérer seulement la présence du requin. C’était un effet digne d’un film d’Alfred Hitchcock. Mais je tiens à dire que ces effets étaient prévus depuis le départ. Ce n’était pas parce que le requin ne marchait pas. Nous n’avions juste pas le temps de le tester. Puis les deux requins, celui qui allait à gauche et celui qui allait à droite ont été utilisés sur le tournage. Nous avons fait de belles prises avec ces monstres tournant autour du bateau. J’ai dit à Steven : « S’il fonctionne, fais tourner la caméra. S’il ne marche pas, c’est juste un test. » Nous manquions souvent de temps. De plus, l’eau salée de l’océan et l’électricité ne font pas bon ménage. Beaucoup de monde pense que nous n’utilisions pas le requin parce qu’il ne marchait pas. Mais parfois, il n’était pas nécessaire de le faire apparaître. Sans le requin, nous avons pu même tourner des scènes bien effrayantes. Dans certains films, le monstre réalisé en CGI est montré trop de fois. D’une certaine manière, le suspense alors n’existe plus. Dans une scène bien célèbre des « Dents de la mer », lorsque Roy Scheider dit : « Il nous faut un plus gros bateau. », nous introduisons enfin le requin. Tout était prévu comme tel.

Ce film fut un vrai défi. Lorsque je faisais les repérages à Martha’s Vineyard, au milieu du mois de décembre, la neige couvrait toute la plage. La baie était déserte. Mais lorsque nous avons commencé le tournage, c’était noir de monde. Tout cela exaspérait Steven alors jeune réalisateur. L’histoire était à propos de 3 types totalement isolés au milieu de l’océan. Il fallait un arrière-plan vide. Nous allions en permanence à la rencontre des bateaux et aux personnes des environs pour qu’ils s’éloignent du champ de la caméra. De nos jours, avec la CGI, ce n’est plus un problème. A l’époque, par contre, c’était un vrai souci.

 

 

Quel est votre requin préféré ?

 

 

Celui avec la mâchoire qui surgit de l’eau et tue Quint. Cependant, il émettait des bruits mécaniques étranges. Quand Steven disait : « Coupez! », l’équipe ne pouvait s’empêcher de rire à cause des bruits. J’avais peur que le public rigole du requin au lieu d’en avoir peur. Après le premier screen test, Steven m’a demandé de faire deux prises supplémentaires. Un apparaît lorsque les trois personnages chantent « Show me the way to go home » puis le requin se met à taper le navire. J’ai construit avec un mur en bois dans mon allée et j’ai utilisé un tuyau d’arrosage pour que l’eau s’y infiltre. Pour la secondehead prise, Steven m’a demandé de l’intégrer dans la scène où Matt Hooper (Richard Dreyfuss) plonge pour explorer une épave et y trouver une grande dent. Dans un trou, une tête apparaît brusquement. Nous avons filmé cette scène dans la piscine de la monteuse Verna Fields. Le studio n’était même pas au courant que nous l’avions faite. Avec parfois rien, vous pouvez faire des choses extraordinaires. Durant le second screen test, le public a alors hurlé en voyant la tête surgir. Suite à la réaction des spectateurs, le studio s’est dit qu’il fallait finalement distribuer le film dans plus de cinémas. « Les dents de la mer » a alors été projeté dans 450 cinémas. Il devint le film avec la plus grande distribution dans les cinémas. Lorsque nous sommes venus à Martha’s Vineyard, nous n’avons pas été reçus comme des héros. Après le  tournage, la ville avait vendu le bateau « Orca » et le requin est parti. Mais avec le succès du film, Martha’s Vineyard a alors planifié des visites guidées. Le bateau est revenu et ils ont réalisé un requin avec le moule d’origine. Au départ, nous étions vus comme des losers avec notre film de requin à petit budget mais au final, nous avons réalisé le long métrage le plus populaire qui n’avait jamais été fait.

 

 

Qu’est-ce qui dans le film vous surprend encore ?

 

 

Il y a environ deux ans, le musée sur l’île de Catalina (Californie) a proposé une exposition de 6 mois sur le film « Les dents de la mer ». Par chance, j’avais tout conservé et je leur ai envoyé mon story board. Ils ont fait une projection du film sur un grand écran à l’extérieur et j’ai fait partie des spectateurs. Pendant tant d’années, je m’étais concentré sur seulement quelques aspects du film. Mais pendant la projection, j’ai remarqué la qualité de l’interprétation des 3 acteurs principaux : Roy Scheider, Richard Dreyfuss et Robert Shaw. J’avais oublié à tel point ils avaient été bons. Les 3 personnages fonctionnent parfaitement ensemble. Pour la maison de Quint, nous avons trouvé un très bon lieu. Un pêcheur, Lynn Murphy, vivait aux alentours. Nous avons engagé lui et sa jeune épouse pour tracter le requin. Murphy était un personnage haut en couleurs, constamment à crier sur sa copine de l’époque. Robert Shaw avait l’habitude de boire toute la nuit avec lui et a su analyser le personnage. Pour le rôle de Quint, il venait de trouver l’attitude et a même pris l’accent de la Nouvelle Angleterre qu’avait Murphy.

 

shaw

 

 

Quels sont vos souvenirs des « Dents de la mer : 2ème partie » (1978) ?

 

 

John Hancock fut engagé pour être le nouveau réalisateur. Zanuck et Brown me voulait à nouveau pour réaliser le design mais je voulais faire davantage. Je suis devenu le designer du film, le producteur associé et le réalisateur de la seconde équipe. J’avais déjà réalisé plusieurs scènes dans le premier film. Steven m’avait en effet confié la séquence où le requin attaque l’enfant. Pour « Les dents de la mer : 2ème partie », ils ont réalisé une nouvelle version du requin. J’avais fait 3 requins avec une petite équipe loin des regards du studio. Cette fois-ci, les producteurs ont été prêts à donner 2 millions de dollars pour le nouveau requin. Nous sommes retournés à Martha’s Vineyard mais ce ne fut pas une bonne idée de tourner les scènes avec le squale à cet endroit. Il y avait des plages en Floride où le sable était blanc et sans bateaux à l’horizon. Cela aurait été parfait pour le tournage. Puis, le studio a finalement viré John Hancock et a été à la recherche d’un nouveau réalisateur. Il fallait en trouver un rapidement car le film devait être tourné pendant l’été. Je suis allé Ned Tanen, alors président d’Universal Pictures et j’ai proposé d’engager le réalisateur français Jeannot Szwarc. J’avais déjà travaillé avec lui sur « Night Gallery ». Jeannot a alors été recruté et j’ai été le réalisateur de la seconde équipe pendant 85 jours. Je tournaishelicopter essentiellement les scènes avec le requin. Ce fut une réelle épreuve se tourner sur l’océan, attendant pendant près de 10 heures que le requin puisse être prêt à fonctionner. J’ai réalisé la scène où l’hélicoptère atterrit sur l’eau et est attaqué. Cela a pris 3 jours à tourner cette scène. Avec la CGI, cela aurait bien été plus facile. Certes, nos requins avaient des défauts mais ils étaient bien présents sur le lieu de tournage. A tel point que je peux dire que le requin était un vrai personnage.

 

 

Vous rejoignez une nouvelle fois Steven Spielberg pour le film « Rencontres du troisième type » (1977). Les extraterrestres et les soucoupes volantes ce fut un nouveau défi pour vous ?

 

 

« Les dents de la mer » n’était pas encore sorti. Cette fois, nous devions travaillé pour les studios Columbia. Steven et moi-même faisions du ski ensemble lorsqu’il m’a parlé de réaliser un film : « Bingo Long Traveling & the All-Stars ». C’était sur l’histoire d’une équipe de baseball noire dans les années 30. J’ai alors commencé à lire des magazines sportifs. Puis, Steven a eu alors un autre projet en tête. Le titre original était « Watch the Skies » et cela devait parlé d’ovnis. Même si nous avions pas encore d’accord avec les studios, j’ai trouvé l’idée meilleure que celle d’un film sur le baseball. Columbia a accepté le projet mais à condition que ce soit un film de science-fiction à petit budget.devilstowe Steven fut d’accord sur le principe. Il avait juste besoin de trouver une grande montagne pour le tournage. De nos jours, il aurait facile d’utiliser Google pour la trouver mais j’ai dû conduire ma voiture pendant près de 6 000 kilomètres pour trouver cette montagne. Nous avons choisi le Devil’s tower dans le Wyoming. J’avais juste une carte qui répertoriait les sommets célèbres. J’ai pris des photos du Devil’s Tower et je les montrées à Steven. Le script parlait d’un complexe militaire où les soucoupes volantes devaient atterrir. Nous devions donc construire une zone pleine de matériel. Je construis une maquette en forme d’arène. « Les dents de la mer » est alors sorti. Avec le succès du film, les producteurs ont alors encouragé Steven à réaliser « Rencontres du Troisième type » avec un budget plus conséquent. Ma maquette fut soudainement trop petite à leurs yeux. J’ai alors fait une nouvelle 4 fois plus grande. L’arène devint alors plus impressionnante. Ce qu’il y a d’amusant avec Hollywood c’est que si vous avez du succès, votre second film aura un plus gros budget. La maquette achevée, je n’avais aucune idée comment construire cette arène en vrai et il fallait que ce soit en intérieur. J’ai finalement trouvé un hangar en Alabama et cela devint le plateau de film le plus grand jamais réalisé…

 

 

Vous avez des souvenirs de François Truffaut qui était alors acteur sur le film ?

 

 

J’aimais beaucoup ses « petits » films. C’était une super idée de l’avoir en tant acteur pour le film. Tout le monde était impressionné par le plateau que nous avions construit. Même George Lucas pensait que cela dépassait ce qui avait été fait pour « Star Wars ». Mais François, lui, ne disait rien… J’avais reconstitué un hôtel typique de ceux que l’on peut trouver dans le Nouveau Mexique. C’était simple et petit. Mais cette fois-ci, François a montré son intérêt. Pour lui, le décor était parfait pour réaliser un drame.

 

 

 

truffaut

 

 

En 1983, vous réalisez « Les dents de la mer 3-D ». Comment avez-vous conçu ce nouveau grand requin ?

 

 

Cette fois-ci, le monstre mesurait plus de 10 mètres car dans une scène un personnage devait enter dans sa gueule. Je travaillais sur un film de ninjas mais au bout de 7 mois de travail, le projet a été annulé. Le studio voulait produire un nouveau Dents de la mer mais en tant que film parodique (« Jaws 3, people 0 »). L’idée était de se moquer du filmjaw3D le plus populaire. C’était vraiment injuste. Comme il a été dit que Steven était hostile au projet, le studio a alors renoncé. La nouvelle histoire écrite par Richard Matheson devait se dérouler dans un parc aquatique. Nous avons visité le marineland de Floride et avons regardé un documentaire en 3-D « Sea Dream ». J’ai alors eu l’idée de réaliser un Dents de la mer qui ne serait pas une suite mais un spin-off. Ce serait une nouvelle aventure avec un autre requin terrorisant un parc aquatique. Le président d’Universal Studios, Sidney Sheinberg, aimait l’idée et m’a demandé de réaliser le nouveau film. Cependant, je n’avais aucune idée de comment réaliser un film en 3-D et nous avons construit des caméras en Europe. J’ai eu beaucoup de soucis avec le producteur Alan Landsberg. Il venait sur le plateau et me disait comment réaliser le film… Ce fut un vrai défi.

 

 

Avec « New-York 1997 » (1981), vous avez travaillé avec John Carpenter. Comment avez-vous imaginé ensemble ce New-York apocalyptique ?

 

 

Je vivais à l’époque à New-York et je connaissais assez bien la ville. Je travaillais sur un film sur la formule 1. Je faisais du repérage sur des circuits en France et en Italie mais lorsque je suis revenu aux Etats-Unis, j’ai appris que le projet était tombé à l’eau. Mon agent m’a alors appelé pour aider un couple à tourner un film. C’était Debra Hill et John Carpenter. Nous avons commencé à chercher des lieux pour le tournage et nous sommes allés au sommet des tours du World Trade Center pour observer New-York. La ville était trop massive pour John. New-York ne pouvait pas être le bon lieu de tournage. Nous avions besoin d’un pont et d’un grand mur. Nous avons un lieu à Saint-Louis (Missouri). Le centre ville était en complète rénovation et avons pu en profiter. De là, nous avons construit le site d’un crash d’avion. Nous sommes ensuite allés en Arizona pour trouver des avions. L’idée était de faire un Air Force One. Quelqu’un nous a alors dit qu’il y avait l’avion parfait pour cela à Saint-Louis (!). Nous avons alors rebroussé chemin. Il y avait un long traveling à réaliser où Kurt Russell devait marcher autour de l’incendie. Nous avons fait une superbe prise : J’ai construit cette grande arène en Californie avec les policiers autour. Kurt est introduit dans cette scène. Puis nous sommes retournés à New-York avec le matériel afin d’avoir le dernier bateau pour Liberty Island. Avec ce transport, nous n’avons pas eu besoin de louer un navire. Les autorités nous ont autorisé à tourner sur l’île toute la nuit. Dans cette scène, Kurt continue de marcher. La prise terminée, nous avons repris le bateau le matin suivant et nous sommes partis en voiture pour Los Angeles. Sur la côte ouest, nous avons enfin terminé le traveling. C’était incroyable de réaliser une telle scène sans trucages. Lorsque vous la regardez, vous n’avez pas l’impression que Kurt est coupé et pourtant cette scène fut tournée à Saint-Louis, à New-York et à Los Angeles. J’ai eu beaucoup de plaisir à tourner avec John et Debra.

 

newyork

 

Pour en savoir plus :

Le site internet (en anglais) de Joe Alves : https://joealvesmovieart.com/

Le livre en anglais « Joe Alves : Designing Jaws » de Dennis Prince – Titan Books 2019 https://www.amazon.fr/Joe-Alves-Designing-Dennis-Prince/dp/1789091012

La page Facebook de Joe Alves : https://www.facebook.com/JoeAlvesOfficial

Only a few films mark the history of cinema. Through the staging, the acting or even a unique atmosphere. All these elements are in the movie ‘Jaws’ (1975). Spielberg’s film, as the first blockbuster, still manages to frighten viewers almost 50 years after its theatrical release. Production designer Joe Alves was really part of the success of ‘Jaws’ by designing the great white shark, a real character of this great movie adventure. Alves also worked on the sequels (he even directed ‘Jaws 3-D’), on ‘Close Encounters of the Third Kind’ (1977) again with Steven Spielberg, and on ‘Escape from New York’ (1981) with John Carpenter . Interview with a real American artist.

 

 

 

When did you join the Jaws team?

 

 

I had met Steven Spielberg when I was doing  the TV series ‘Night Gallery’. We worked then on ‘Sugarland Express’ (1974) which was Steven’s first movie. The producers were Richard D. Zanuck and David Brown. They had done great movies such as ‘Butch Cassidy & the Kid’ (1969) with Robert Redford and Paul Newman for Universal Pictures. Working on a television show, I get a call from David Brown. His wife, Ellen, had a job in the literature section of lifestyle magazine,shark1 Cosmopolitan, and read a book about a shark. The novel was ‘Jaws’ And she thought it could be a good movie. Brown then called me to do some illustrations for the adaptation. I did some 25 of them, though I was not paid for that. In-between, I tried to find good locations for the shootings too. Steven was not involved in the movie yet. But when I did a good number of illustrations, the producers and I had a big meeting and then Steven was brought to the project.

 

What were your inspirations for the making of the 3 mechanical sharks ?

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During the big meeting with all the department (special effects, entertaining, photography) at Universal executive Marshal Green’s office, I did my big presentation. Steven and I decided to do this in the real ocean not in a pool like in some movies we had seen before. It always looked phoney. We also wanted a big shark, a 25 feet one. The special effects didnt like the idea because it hadnt been done before. It would have taken more than a year. Marshall got upset and said ‘Jaws’ could be a bigger movie than ‘The Hindenburg’. Everybody laughed because ‘The Hindenburg’ with George C. Scott was supposed to be the biggest movie. It was clear that our shark movie was not a big movie for most of the people. However, Marshall still believed in the project And, when I was collecting my papers, he asked me to do the shark. I said ok and first I went to Disney studios because they had made a whale. They answered they could do the shark but it was impossible to put it in the ocean. Then I asked Joe Lombardi who made the Godfather’s special effects. He could not help because it was impossible for him to stay in a project that could takejawjaw more than a year. I started researching about sharks especially the White Sharks. I studied how they move. I was inspired by the Australian movie ‘Blue Water White Death’ (1971).  Then I met retired special effects artist Bob Mattey who did the giant squid in ‘20,000 Leagues Under the Sea’ (1954). He agreed to help me for the sculpture of the shark and a couple of days later Bob came back with a wired sculpture of the jaws. Then I started a team with 7 guys that I called the Magnificient Seven. We made a 4-foot white shark then I met an ichtyologist from San Francisco, Leonard Compagno, who worked with me on the Model. We made all the details of what the shark looks like. From there, we made it six times that size (25 feet). That was the process of how we started. We figured we needed 3 sharks (a shark head with a mechanical arm, one that could swim to the left, one swimming to the right). We needed 25-feet of depth in order the shark could come up And a small tide which means we could not shoot the movie on the west coast but on the east coast. In December 1973, I met Peter Benchley, Jaws’ author. With a map of the east coast, not the naming the towns, but the depth of the water and the tides, I asked where we could shoot the Shark. There were 2 islands : Martha’s Vineyard and Nantucket (Massachusetts). Peter said I could go to the latter because his parents lived there. He had never been to Martha’s Vineyard. I scouted all over Long Island. The sea was too rough in Nantucket so I never reached the island this time. Then I took a boat to Martha’s Vineyard. I found a village, a town, and this big bay with a small tide. It was the perfect location for the shootings. A perfect place for a shark to come in and destroy. I contacted Steven and then we started the process.

 

 

Jaws mechanical shark

 

 

How did you concept the shark ?

 

 

In November-December 1973, we started building the shark. We basically needed a year for this. But the book ‘Jaws’ by Peter Benchley came out in february 1974 And the studio said we have to start shooting in two months. I told Steven and the department I needed a year to build the Shark but they wanted to use the popularity of the book to sell the movie. Steven convinced the department to give one month more. It was early May which was terrible because on the East coast, in the ocean it was really cold. Moreover the 3 sharks were not ready yet. So we decided to shoot the movie without the shark first. For instance, we used the barrels coming and sinking. It was like in a Hitchcock movie. All these thingsspielberg were planned and they were not a replacement of the shark. We just didnt have the time to test the shark. But first we used the shark models going to the left and going to the right. We made some great shots with this big shark swimming around the boat. I said to Steven :’If it works, shoot it’. If it doesnt it would be like a test. Furthermore, the salted water of the ocean and electricity don’t work well together.

I have to clarify all of this because many people think in some scenes we didnt use the Shark because it didnt work. We just didn’t need to use it. We made some scary scenes without the shark. We don’t see it but we know it’s there. In some movies, you see too much of the CGI monster. You actually lose the suspense. On the famous Jaws scene, we really introduced the shark when Roy Scheider says : « We’re gonna need a bigger boat. » This was the process. Sometimes, the shark didnt work because it wasnt testing. We hadn’t a lot of time. This movie was really a struggle. When I scouted Martha’s Vineyard, in mid-December, there was snow on the sand. The bay was empty. But when we came back, the place was overcrowded. As a young director, Steven was very concerned with all these people around. The story was about 3 guys totally isolated in the middle of the ocean. The difficulty was clearing the view. It was sometimes difficult to move people and boats. Nowadays, we could easily use CGI, but not during this time.

 

 

What was your favorite shark ?

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The one with the big jaws coming out of the water to the cabin and killing Quint. However, the shark made a lot of strange mechanical noises. When Steven said: ‘Cut’. The crew couldnt resist to laugh because of the noises. My fear was the audience may laugh at the shark instead of being scared. After the first screen test, Steven told me to do 2 additional shots. One was when the 3 guys sing ‘Show me the way to go home’ then the shark hits the boat. I built a wood wall in my driveway and in the shot with a hose you could see the water coming out into the wall. Concerning the second additional shot, Steven asked me to add it when Matt Hooper (Richard Dreyfuss) dives to explore the vessel and found thehead tooth. In the hole, we see a head appear. We shot this in a swimming pool owned by film editor Verna Fields. The studio didn’t even know. Sometimes we could do something brilliant with nothing… During the second screen test, when the audience saw the head coming out of the hole, they were crazy and screaming. And when the studio saw the audience reaction, They saw we could reexamine a better distribution. Jaws was seen on 450 theaters which was the biggest release ever at the time. When we were shooting the movie in Martha’s Vineyard, we were definitely not seen as heroes. They even sold the Orca boat and they dumped the shark in the backlot. Then, with the success of the movie, they wanted to make something for the tours. The boat came back and they made a shark from the original mold. First, we were seen as losers making a low budget shark movie but in the end we made the most successful movie of that time.

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What in the movie still surprises you ?

 

A couple of years ago, the museum on Catalina Island (California) made a 6 month Jaws exhibition. Fortunately, I saved everything and I sent my original storyboard. There was a screening on a big screen outside and I watched the movie. I had been away for so long and I didn’t think about the stuff I did. I just focused on the acting of the 3 actors Roy Scheider, Richard Dreyfuss and Robert Shaw. I had forgotten how they were so good. The différent characters work so well together. Concerning the performances: I remember we made Quint’s place. We found a great place. There was a fisherman, Lynn Murphy, living therep. We hired him and his young girlfriend for the movie to tow the shark. Murphy was a real character always yelling at his girlfriend. Robert Shaw and he used to drink together at night. Shaw then analysed Murphy and used his New England accent and his attitude.

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What are your memories of Jaws 2 (1978) ?
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John Hancock was hired to be the new director. Zanuck and Brown wanted me for the design but I wanted to get more involved. I became the designer, the associate producer and the second unit director. I had directed some shots in Jaws. Steven let me to shoot the sequence of the shark  attack on the kid. For Jaws 2, they started remaking the shark. When I made the first 3 sharks it was with a small team away from the studio. It was low-budget. For Jaws 2, the producers wanted to give 2 million dollars for the new shark. We came back to Martha’s Vineyard but it was not a good idea to shoot the shark there. There were some great beaches in Florida with white sand and no boats. It was the perfect location for shooting the shark scenes. Then i learned the studio fired John Hancock and was looking for a new director. It was important to find quickly a new one because wehelicopter wanted to shoot the movie in summer. I went to Ned Tanen who was the president of production at Universal Pictures and I suggested to choose the French director Jeannot Szwarc. I had worked with him for the series ‘Night Gallery’. Jeannot became the new director. I was the second unit director and I ended up directing 85 days, especially the shark shots with and without actors. It was a real pain to shoot in the ocean, waiting for 10 hours till the shark is ready to work. I did the shot with the helicopter landing on the water and then the shark attacks. It took 3 days to get one shot. With CGI, it would have been much easier. Obviously, our shark had flaws but because it was real during the shootings. It was a real character.

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You joined once again Steven Spielberg with ‘Close encounters of the third kind’ (1977). Were aliens and flying saucers a new big challenge for you ?
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Jaws had not come yet. This time, we worked for Columbia Studios. Steven and I were skiing when he talked to me about this new film idea ‘Bingo Long and the Traveling All-Stars’. It was about a black baseball team in the 30s. I started to read some sport magazines. Then, Steven finally had another project. The original title was ‘Watch the Skies’ about UFOs. Though he didn’t have a deal with studios yet, I thought it was a better idea than a baseball movie. We finally had a deal with Columbia Studios but only for a low-budget science-fiction movie. Steven agreed but needed only an outdoor location: a bigdevilstowe mountain. Nowadays, it is easy with Google to find places. During that time, I traveled by car 3,000 miles to locate the mountain, Devil’s Tower in Wyoming. I just had a map of the national monuments. I drove my car and I found this huge butte. I took photos and showed Devil’s Tower to Steven. In the script, there was a military compound the flying saucers land on. It means we really needed a technical area with a lot of equipment. I made a model of a big arena. Then Jaws came out and it was a huge success. The producers then wanted to make a bigger movie with Steven Spielberg. They thought my big arena was too small. I made another model 4 times bigger and it was much more powerful. Hollywood is funny : if you make a big success, your second movie could be bigger. The model finished, I didnt have a clue where to build the arena. It had to be inside. I found a hangar in Alabama. It became the biggest set ever made in that time.

 

Do you have any memories of François Truffaut who was an actor in that movie?
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I was a big fan of his ‘small’ movies. It was a great idea to ask him to join the film. Everybody was really impressed by our huge set. Even George Lucas thought it was better than Star Wars. But François said nothing… Then I made a hotel set for a scene taking place in New Mexico. It was small and simple with typical New Mexico decorations. This time, François was really impresssed. It was actually perfect for him for a drama.

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truffaut
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In 1983, you directed Jaws 3-D. How did you create this new big shark ?

 

 

This time the shark ended up with 35 feet because there is a scene where a character is inside the mouth. I was working on a ninja movie but it was canceled after 7 months of working. The studio wanted to make Jaws 3 as a spoof film a comedy (‘Jaws 3 peoplejaw3D 0’) for making fun about the most succesful movie ever at the time. That was pretty unfair and we believed Steven was upset about it so the studio gave up the idea. The new story, written by Richard Matheson, took place in a waterpark. We visited the marineland of Florida and watched the 3-D documentary ‘Sea Dream’. Then I had an idea : the new Jaws wouldnt be a sequel but like a spin-off about a new adventure with another shark terrorising a waterpark. All of this in 3-D. The president at Universal Studios, Sidney Sheinberg, liked the idea and asked me to direct it. I had no idea about filming 3-D. We built cameras in Europe. I had a lot of problems with the producer Alan Landsberg because he used to come to tell me how to direct the movie… It was a real challenge.

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With Escape from New York (1981), you worked with John Carpenter. How did you collaborate to create this apocalyptic New York ?

 

 

I was living in New York and knew the city pretty well. I had worked on a Formula 1 movie. I scouted tracks in France and in Italy but when I came back to the US, I learned the project was canceled. My agent then called me to help on a new movie with a young couple, Debra Hill and John Carpenter. We started scounting for the movie and went up to the top of the Twin towers and watch the city. New York was too big for John and we thought it was not the best location. We needed a bridge and a big wall. We checked around and found a bridge in Saint Louis. We could also use the old section of the downtown. We moved from New York to Saint Louis and we created a plane crash location. We went to Arizona to find airplanes. We had to make an Air Force One. Someone told us There was the perfect plane for this in Saint Louis (!). So we came back. We did a long travelling shot with Kurt Russell walking around the fires. In one shot, we did something amazing : I built up a big arena in California with the police forces. Kurt came in there in the movie. Then we drove all of this to New York to the last ferry to Liberty Island. So we didnt need to pay a special boat for this. The federal officials granted us permission to shoot there at night. Kurt then walked through the arena. Then we took everything back to the boat the following day and we drove it back to Los Angeles. There we finished shooting the scene. It was incredible because we didnt use any tricks. It seems that in this scene, Kurt doesnt leave, but actually we shot that scene in Saint Louis, Los Angeles and New York.
I had a lot of fun with John and Debra doing this movie.

 

 

newyork

 

Further readings :

 

Joe Alves’ website : https://joealvesmovieart.com/

‘Joe Alves : Designing JAWS’ by Dennis Prince – Titan books 2019 : https://www.sideshow.com/collectibles/jaws-joe-alves-designing-jaws-titan-books-905979

Joe Alves Facebook Page : https://www.facebook.com/JoeAlvesOfficial

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