Que ce soit au premier ou au second plan, les couleurs semblent nous agripper pour mieux nous envouter. Les photographies de Middy Sebolavy bousculent notre regard. Unique personnage, l’artiste du Nord de la France se contorsionne ou fixe le spectateur. Chaque image possède un message à déchiffrer. Chaque image est minutieusement mise en scène. Il y a du son qui en sort…
Entretien avec l’artiste Middy Sebolavy.
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Le souhait de s’exprimer par l’art et plus particulièrement par la photographie, est-ce pour vous une évidence ?
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Il s’agit avant tout d’un cheminement.
J’ai travaillé dans de nombreux domaines professionnels dont la photographie et le maquillage artistique. J’y ai appris les artifices du théâtre et du cinéma. Ajoutez à cela une grande curiosité et une sensibilité exacerbée : je disposais de toutes les clés pour m’exprimer et créer mon propre univers.
Je suis artiste plasticienne depuis environ 5 ans. Autodidacte, j’aime et mets un point d’honneur à revêtir tous les rôles : photographe, modèle, accessoiriste et maquilleuse.
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Pourquoi un tel pseudonyme ?
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C’est avant tout une façon de dissocier ma vie privée et ma vie professionnelle. D’entrer dans la peau d’un personnage qui va cependant me permettre d’aborder des sujets qui me tiennent vraiment à cœur et que je souhaite défendre.
Le nom SEBOLAVY fait écho au personnage inventé par Marcel Duchamp, Rrose Sélavy.
Car même si j’aborde des sujets souvent délicats et sensibles, je souhaite le faire positivement et laisser passer la lumière.
Dans l’art, c’est souvent la beauté (toute relative) ou l’originalité d’une œuvre qui va accrocher le regard.
Au premier abord, mes œuvres misent par conséquent sur l’esthétisme, mais si l’on gratte un peu la couche de vernis superficielle, si on les « démaquille », on découvre alors des thématiques plus profondes.
Le choix du prénom Middy est quant à lui plus poétique. Midi est le moment où le soleil est au zénith.
Un clin d’œil une fois encore à la lumière et à la positivité, mais aussi une façon imagée de séparer ma vie en deux parties bien distinctes. Il y a eu l’avant Middy et il y a désormais l’après Middy.
C’est à dire ma rencontre avec l’Art, mon ouverture au monde et à la vie, mon oxygène.
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Le sucré est-il une substance rassurante ou finalement est-ce un cadeau empoisonné ?
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Le sucre est une substance douce mais aussi addictive. Comme un grand nombre de personnes, je suis personnellement très gourmande et j’adore les pâtisseries.
J’ai travaillé autour du sucre au tout début de ma carrière d’artiste dans ma série intitulée « Religieuses et Tartes au flan ». Je voulais véhiculer des messages à la fois positifs et colorés : je m’inspirais d’œuvres de grands maîtres de la peinture et m’amusais à les détourner avec des titres évocateurs tels que : La Faim tragique de Marie-Antoinette, La Marie aux Madeleines ou encore la Baba au Rhum et ses cocos.
Des personnes m’ont raconté qu’en voyant mes photographies elles ont eu envie de découvrir les peintures dont je m’étais inspirée. Ce fut une vraie joie de l’apprendre.
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L’art classique vous inspire ?
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J’ai toujours aimé les musées d’art ancien. Le religieux me plaît beaucoup et l’aspect mystique m’envoûte. J’aime l’idée que des artistes d’autres siècles continuent à nous faire réagir à travers leurs œuvres. J’espère que mes photographies, à leur tour, seront regardées et parleront aux générations futures.
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Vous mettez en scène votre corps. Est-ce que vous le modifiez, voire le façonnez pour vos photos ?
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Je joue avec les couleurs et j’utilise le maquillage afin d’accentuer les traits de mon visage, je porte des tenues particulières que j’accessoirise mais je ne modifie jamais mon corps et ne m’astreins à aucun régime.
Chaque œuvre est l’occasion d’incarner un nouveau personnage, de m’évader et de me réinventer.
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L’autoportrait est-il rassurant ?
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Il y a une part d’introspection dans ce processus.
En choisissant l’autoportrait, je fais aussi le choix de m’exposer deux fois car j’expose avant tout mon travail, mes idées, ma vision du monde mais aussi mon corps.
Je me mets à nu et prends donc le risque de subir la critique sur le plan artistique ET personnel.
Mais cette double exposition ne m’effraie pas car je considère qu’une œuvre est « réussie » dès lors qu’elle suscite une réaction chez la personne qui l’observe, et ce, qu’il s’agisse d’une réaction positive comme d’une réaction négative.
Le seul cas de figure qui pourrait me peiner serait assurément l’indifférence.
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Quel est le temps consacré aux couleurs ?
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Je suis mes intuitions puis je les laisse mûrir. Les couleurs s’additionnent naturellement et s’intègrent à mon idée comme une évidence.
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Quelle est l’œuvre qui a été la plus longue à réaliser ?
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Toutes mes œuvres sont minutieusement préparées et je ne compte pas mes heures.
La prise de vue peut prendre une journée entière et le processus créatif plus d’un mois.
Pour les photos performatives réalisées en extérieur, il faut également composer avec les éléments naturels.
La série intitulée « NeutrinOnirique » dans laquelle je m’enferme dans une bulle est un bel exemple de cette contrainte car il m’a fallu faire face à de nombreuses envolées ou éclatements de ballons, le tout sous l’œil vigilant de la police allemande pour celle réalisée face à la Porte de Brandebourg.
Mais je dois dire que cette course contre la montre et cette montée d’adrénaline font partie de l’œuvre et surtout du plaisir que me procure l’acte de création.
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Que révèlent les titres de vos photographies ?
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J’attache une importance toute particulière aux titres de mes œuvres.
Ils font pour moi partie intégrante de mon travail et de sa compréhension.
Souvent en rapport avec le tableau m’ayant inspiré, quand c’est le cas, ou en lien direct avec le sujet abordé, ils sont à l’image de mes œuvres : empreints d’humour et d’ironie.
Ne pas lire le titre de mes œuvres, c’est les étudier à moitié : ils sont indissociables.
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Où voulez-vous aller à présent ?
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J’aimerais aborder davantage le droit des femmes et leur place dans la société.
Il y a malheureusement aujourd’hui encore beaucoup trop de situations que j’estime injustes et que j’aimerais défendre.
Même si cette thématique est souvent périlleuse et grave, je continuerais cependant à l’aborder avec douceur car par sa force et son esthétisme, l’Art m’offre les moyens de mener ce combat sans brutalité ni violence.
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Photo de couverture : Vitrospection ©ADAGP Paris 2024
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Le site internet de Middy Sebolavy : Home | Middy SEBOLAVY (bigcartel.com)