Véritable star du milieu X dans les années 90 début 2000, la Brésilienne Olivia Del Rio a toujours été une actrice unique. Avec son caractère bien trempé, elle est le reflet d’une époque forte du cinéma pornographique.

« Antoine & Cléopâtre » (1996), « Torero » (1996), « La Ruée vers Laure » (1997), « Les Orgies de Messaline » (1997), « Exhibitions » (1999), « Amazonesex » (2001),… sont des films qui continuent d’être de véritables références X.

Pourtant, le parcours d’Olivia Del Rio ne fut pas évident et montre même de véritables épreuves. Entretien afin de traiter d’une carrière singulière mais aussi des projets d’une actrice hors du commun.

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Originaire d’une famille très modeste au Brésil, aviez-vous déjà une idée de ce qu’était la sensualité et la pornographie ? Vos proches disaient de vous que vous étiez laide.

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Pas du tout. Enfant, j’accompagnais mon père à l’église et nous avions l’habitude de frapper aux portes pour récupérer des vivres afin d’aider les familles qui étaient encore plus pauvres que nous. Je n’ai grandi que dans ce milieu.

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En mai 1994, vous quittez le Brésil pour la France. Vous devenez femme de ménage puis vous devenez actrice X. Aviez-vous des réticences ? Avez-vous appris à vous aimer ?

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Je venais de me séparer de mon mari. J’ai eu tort d’emmener ma fille avec moi pour que nous puissions vivre chez une de sœurs.  Son père a prétendu que c’était un enlèvement et la justice brésilienne m’a fait perdre la garde de mon enfant.

© Brieuc CUDENNEC

J’étais jeune – je voulais voir autre chose que le Brésil donc j’ai pris la décision de venir en France. Je suis en effet devenue femme de ménage. C’était une vie pénible car je n’arrivais pas à obtenir beaucoup d’argent. Au départ, je vivais chez deux Egyptiens. Nous vivions dans des conditions très spartiates. Nous dormions sur le sol dans la même petite pièce.

Une amie, Maria, m’aidait financièrement mais je ne pouvais pas continuer ainsi. Elle m’a proposé de rencontrer le réalisateur de films X Patrice Cabanel. Ayant peu de ressources, je n’ai pas d’autres choix que de rentrer dans cet univers.

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Avez-vous voulu faire carrière dès le début ?

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Je voulais juste gagner ma vie. Ayant eu une éducation religieuse et étant pudique, j’avais beaucoup de difficultés à me mettre nue devant une caméra. Je ne parlais même pas français. Dès que je revenais chez moi, je me mettais à pleurer. Maria ne comprenait pas ma peine. Je n’avais qu’un seul et unique but : retrouver ma fille et acheter une maison pour ma famille.

Avec le temps, j’ai fini par accepter le fait d’être actrice X.   

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Les années 90 ont été marquées par l’épidémie du Sida. Etait-ce un sujet sérieux dans le milieu porno ?

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Au début de ma carrière, la question du préservatif ne se posait pas. Il fallait tourner sans. Cependant, une fois par mois minimum, nous avons été dans l’obligation de faire des tests. Certaines productions demandaient même les résultats aux laboratoires la veille du tournage. Je ne pensais pas tomber malade par conséquent j’acceptais de faire les scènes sans préservatif.

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Ce fut un plaisir de jouer Cléopâtre pour les Italiens (« Antoine et Cléopâtre » 1996) ?

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J’ai été populaire car ils pensaient que j’avais des airs de Sophia Loren et de Gina Lollobrigida. J’avais à peine conscience de l’ampleur du projet du film. Je savais juste avec qui j’allais tourner. « Antoine et Cléopâtre » était différent car nous avons tourné avec du 35mm et le réalisateur était Joe d’Amato – Il avait tourné auparavant des films classiques. Ce fut un beau tournage mais j’aurais vraiment aimé porter des costumes d’époque.  

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Vous avez tourné 8 films avec Joe d’Amato. Était-il le réalisateur le plus professionnel ?

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Il était très respectueux. Joe était comme mon père. Donatella, sa maîtresse à l’époque, s’était occupée du casting. Tous les deux m’ont à chaque fois protégé. Avec Joe d’Amato, je peux dire que j’étais au sommet de ma carrière.

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Le milieu du X est-il un monde conservateur ? Très masculiniste ?

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J’ai exercé plusieurs métiers dans ma vie. Je me suis toujours mis à la place du client. Dans les salons de l’érotisme, certaines filles étaient mécontentes de rencontrer leurs fans. Quant à moi, j’acceptais les conditions. Par conséquent, j’ai toujours été aimable avec ceux qui venaient et qui achetaient les vidéos. J’ai toujours été professionnelle.

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Vous avez également joué dans « Déjà Mort » (1998) d’Olivier Dahan et dans « Peut-être » (1999) de Cédric Klapish. Avez-vous aimé l’expérience cinéma classique ?

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Il s’agissait de tous petits rôles donc pour moi ce n’était pas sérieux. Je suis sûre que certains spectateurs n’ont même pas remarqué que c’était moi (rires). Je me concentrais dans ce que je savais bien faire : être actrice X. Aujourd’hui, j’ai d’autres priorités.

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Vous avez préféré les tournages américains aux tournages européens. Les Américains étaient-ils plus professionnels, plus respectueux ?

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Pour certaines choses oui. En Europe, on vous donne facilement des étiquettes. J’ai fait la bêtise d’arrêter ma carrière pour ma vie de couple mais l’amour ne dure pas… Bien que plus âgée, j’espère reprendre ma carrière auprès des Américains jusqu’à mes 60 ans. J’ai prévu d’aller vivre aux Etats-Unis pendant plusieurs mois afin de développer ma maison de production. Je souhaite même devenir réalisatrice.

En ouvrant mon compte Onlyfans, j’ai connu une certaine popularité mais cela demande beaucoup de temps. Je ne suis pas très à l’aise avec la nouvelle technologie.

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Vous êtes aujourd’hui dominatrice. Cela demande d’autres talents ?

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C’est très différent d’être actrice. Lorsque vous êtes dominatrice, il n’y a pas de sexe. J’ai commencé à être pendant ma carrière d’actrice X. J’allais au Château qui est un club dans le 18ème arrondissement de Paris. J’accompagnais le réalisateur Christophe Mourthé. Il aimait prendre des photos sur le thème du fétichisme. J’ai aimé cet univers fermé et discret.

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© Brieuc CUDENNEC

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Photo de couverture : © Brieuc CUDENNEC

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