Le jouet fait intégrante de notre jeunesse. Au fil des années, il nous accompagne et évoque bien souvent une certaine nostalgie. Des adultes continuent de les garder et même de les collectionner. Le jouet est en effet un objet d’art à part entière. Il est le matériel de nos passions animées. Batman, Spiderman, Star Wars, GI Joe,… Toutes ces références sont ancrées de la pop culture avec notamment l’aide du jouet.

Passionné par ce bel accessoire, Nicolas Brosseau a décidé de confectionner et de personnaliser les passions de son enfance. Superhéros, robots, monstres,… Tous sont de réelles inspirations.
Entretien au sein de son atelier et de ses jouets.

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Vous avez auparavant travaillé dans le milieu de la mode puis dans les effets spéciaux. Le monde des jouets a-t-il tout de même été éclipsé pendant une partie de votre vie ?

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J’ai toujours été connecté à ce monde du jouet. De l’âge de 5 ans à 25 ans, j’ai collectionné de manière compulsive tout ce qui était lié à l’univers de Batman. Même lorsque j’ai commencé à travailler dans la mode dès 20 ans, je n’ai pas mis de côté ma passion. Au fil du temps, cette envie frénétique de collectionner est enfin devenue un travail de plasticien. Il s’agit aujourd’hui de ma passion et de mes activités professionnelles.

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Le monde du jouet est-il devenu un monde de collectionneurs exigeants ?

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Concernant le jouet industriel, certains souhaitent en effet détenir un objet quasi parfait avec tous les accessoires. De nos jours, il y a également un goût pour l’historique du jouet. Tous ces éléments sont d’ailleurs une source importante de mon travail. J’étudie les premiers artworks qui ont permis la confection du jouet. Cela rend ce dernier plus attrayant en plus du fait qu’il est une pièce unique ou limitée. Je réalise des jouets que j’aurais aimé avoir étant enfant.

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Vos jouets sont-ils réservés avant tout aux adultes ?

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Par la matière première et les peintures, oui. Je ne me préoccupe pas de la matière pour une cible enfant. Je déconseille de jouer avec de la polyrésine, ce sont avant tout des pièces de collection.

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Quel est le meilleur moment du projet ?

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Le moment de la peinture est sûrement le plus agréable. Avec la couleur, l’objet prend vie. Même avec une forme ratée, un jouet peut être beau avec les couleurs adéquates. Une très belle sculpture peut tout aussi être gâchée par une mauvaise peinture.

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Le Batman du dessin animé de 1992 était-il une évidence ?

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Il s’agit du dessin animé qui m’a profondément marqué durant mon enfance. Mes parents ne m’autorisaient pas à regarder les émissions jeunesse de TF1. Par conséquent, je n’ai pas été marqué par d’autres univers tels que Dragon Ball Z.

Ce Batman de 1992 était un des premiers dessins animés réservés à la fois aux enfants et aux adultes et qui abordaient des thèmes à la fois durs et violents. De plus, le design était formidable.

Inconsciemment, Batman était un personnage qui faisait profondément écho à ce que je vivais à l’époque. Le deuil avait touché l’ensemble de ma famille. Bruce Wayne, traumatisé par l’assassinat de ses parents, était un personnage en qui je ne pouvais que me connecter.

Dans sa construction d’homme, il a été confronté au deuil et il lui a été impossible  d’embrasser convenablement ses émotions. Wayne fait le choix de les dissimuler sous un masque de vengeur mais aussi un masque social sous les traits du riche playboy. Le patriarcat qu’il partage avec notre société ne lui a pas permis d’assumer sa peine et ses émotions entant que garçon, il s’est renfermé sur lui même.

Suite à la diffusion du dessin animé, j’ai eu une passion dévorante pour tout ce qui se rattachait à l’univers de Batman. 

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Ce jouet est-ce Bruce Wayne ou un Batman démasqué ?

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Il fait écho à l’aspect qui m’exaltait le plus dans le dessin animé de 1992. J’adorais voir Bruce Wayne vêtu de la tenue de Batman mais sans la cagoule. Par conséquent, je voulais réaliser un jouet qui marque cet instant.

Cet homme est en souffrance. Avant même d’enfiler la cagoule, Bruce se rend compte de la folie du projet. Cependant, étant brisé, il ne peut reculer et doit se lancer dans une double vie.

J’ai compris des années plus tard l’aspect problématique du fait que ce Batman impose sa loi. Quelle est finalement la légitimité de ce milliardaire en tant que justicier ?

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Pourquoi l’ancien de 1939 ?

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Je voulais confectionner le premier instant du mythe. Ce Batman est le premier.

Pendant le premier confinement, je me suis retrouvé dans ma maison de vacances à redécouvrir toute ma collection de Batman. Des caisses étaient remplies de plus de 2 000 objets. J’ai eu l’idée du Batman de 1939 car c’était pour moi le jouet ultime que j’aurais souhaité avoir enfant.

Je voulais également rappeler le fait que pendant longtemps (jusque dans les années 2000), le scénariste Bill Finger, cocréateur avec Bob Kane de Batman, a été oublié. Il est pourtant le principal artisan du mythe.

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La boîte fait-elle partie intégrante de l’objet ?

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Pour un collectionneur, le packaging fait partie intégrante de l’objet. Je voulais une boîte aussi qualitative que le jouet. J’ai travaillé sur le projet avec le sérigraphe Vivien Le Jeune Durhin. Cette boîte ne peut être détachée du jouet.

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Y’a-t-il une part de fantaisie ?

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Oui avec le fait que je voulais montrer Bruce Wayne triste. C’était une façon pour moi de le rendre plus humain. Pour la première fois, un jouet montre Batman et surtout Bruce Wayne triste.

Les roses sont également une part de fantaisie car les fleurs sont souvent proscris des jouets genrés garçon.

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Les robots c’est une folie ?

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C’est une autre passion qui date de mon enfance. Ma mère aimait souvent m’imiter en disant : « Moi je veux moi je veux un robot moir ». 

J’aime l’identité de cette machine car il n’est ni vivant ni mort – seulement programmé par des humains. J’ai réalisé un robot qui évolue dans un monde où les humains n’existent plus. Il est pour l’instant à la recherche de l’étincelle qui a révélé l’humanité. Le robot est une machine qui envie finalement les êtres humains. Dans sa quête, il trouve une armure et l’enfile. Le robot ressent alors une conscience qui est en lui – comme s’il disposait à présent d’une âme au même titre que les humains. Il prend pourtant conscience en enlevant l’armure qu’il n’a pas à présent une âme mais un égo.  

Le sujet me passionne d’autant plus aujourd’hui avec l’évolution des intelligences artificielles.

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Comment est né le Space Emperor ?

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Il s’agit un projet avec Baptiste Dupaigne de la ferme Corsange à Bailly Romainvilliers (Seine-et-Marne). J’ai été invité dans une résidence d’artiste pendant dix jours. Pendant trois jours, je devais faire les poubelles de la ville afin de trouver des objets à recycler pour réaliser de 2 sculptures inspiré de l’univers du jouet.

J’ai crée alors le personnage du Space Emperor avec la découverte d’un mini aspirateur. 

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Skeleton, Batman, le Shogun warrior,… Vos jouets doivent-ils être robustes ?

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Oui mais malgré moi. Ce caractère symbolise la virilité que l’on souhaite inculquer aux garçons. J’ai beaucoup de mal à me détacher de cette figure, surement dû au conditionnement social et culturel.
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Comment se sont passés les cours avec les enfants de Bastia ?

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Cette intervention pour réaliser sur 8 jours des robots en matériaux recyclés fut un exercice passionnant. J’avais une expérience similaire à Kinshasa (République Démocratique du Congo). Le centre culturel de la ville de Bastia m’a proposé de travailler avec des enfants de quartiers populaires.

Le projet fut beaucoup plus complexe que prévue car j’ai laissé aux enfant la possibilité de créer le design de leur choix. Pour des questions de planning j’ai du largement contribué à la confection des robots pour terminer à temps. Ca a été très dense mais les enfants étaient ravis.

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Quels sont vos projets ?

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Trouver un atelier. L’idée fait son chemin. Je réfléchis également à une nouvelle figurine d’un personnage mythique de film SF. Son design original est super et je voudrais capter un moment émotionnel précis.

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