Certains et certaines s’y rendent pour se dépenser, d’autres y vont pour au contraire se détendre. La piscine reste un lieu incontournable de notre quotidien. A l’approche des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris, l’odeur du chlore, les longueurs mais aussi l’architecture de ce lieu sportif sont toujours aussi populaire. Passionnée de piscine, Nageuse parisienne a décidé de se lancer un défi à elle-même : tester en l’espace d’un an les 42 piscines municipales de la capitale et partager ses avis auprès de ses followers sur Instagram. Tout est étudié : la qualité du bassin mais aussi les vestiaires et l’histoire même du lieu aquatique. En un mot : l’ambiance.

Entretien avec Nageuse parisienne qui continue avec passion de visiter les piscines municipales.

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Paris, 42 piscines municipales – un an pour toutes les tester et trouver la meilleure d’entre elles. Comment est né un tel défi ?

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L’idée d’aller nager dans toutes les piscines parisiennes est née en décembre 2021. Nakache, la piscine dans laquelle je nage presque chaque jour, allait fermer pour vidange pendant les vacances. Ce genre d’information est toujours difficile à encaisser pour un nageur ou une nageuse. Mais là, au lieu de désespérer, je me suis dit que ça pourrait être l’occasion d’aller nager à Georges Hermant, dont plusieurs amis m’avaient parlé. L’idée de découvrir une nouvelle piscine m’a mise en joie, et, alors que je nageais à Georges Hermant, j’ai eu cette idée d’aller nager dans l’ensemble des piscines parisiennes et de documenter ça sur un compte Instagram. 

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La figure de la femme grenouille mêle humour et identité aquatique. En quoi ce fut un choix évident pour vous ?

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La femme-grenouille s’est vite imposée comme identité visuelle, d’abord parce que ça fait longtemps que je suis persuadée d’être en partie une grenouille. Les premiers montages de moi en femme-grenouilles datent de 2012. Ça me permettait aussi de préserver mon anonymat – j’y tiens, je trouve que ça donne une plus grande liberté. Et ça ajoute un peu de second degré au projet.

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Vous vous documentez également sur l’architecture et l’histoire des bâtiments. Quelles sont les informations les plus pertinentes que vous avez pu trouver ?

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Je ne pensais pas m’intéresser à ce point à l’architecture des piscines. Pourtant, c’est un sujet plein d’anecdotes fascinantes. J’ai adoré découvrir, épluchant une lettre aux archives de la ville de Paris, que la piscine Auteuil avait été dessinée de telle sorte à être aussi invisible que possible. J’ai aussi adoré avoir au téléphone l’homme qui a dessiné la piscine Champerret, et n’en garde quasiment aucun souvenir. J’adore aussi détailler les différentes vies architecturales d’une piscine, je pense par exemple à Hébert, construite en 1896, rénovée en 1920 puis à la fin des années 1980. La piscine porte des traces de ces différentes époques, ça lui donne une grande richesse. Ce projet m’a permis de comprendre que j’adorais l’architecture. Maintenant, plein de détails de Paris m’évoque une piscine, ou à un courant architectural. Je pense par exemple à cette pharmacie 1970 de la rue de la roquette, façade en carrelage, entrée en forme de croix et vitrines aux bords arrondis, qui m’évoque tout de suite la piscine de la cour des Lions, dans le 11ème.

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On sent chez vous un plaisir d’écrire.

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Oui, c’est une révélation pour moi. En tant qu’éditrice, je suis plutôt du côté de la relecture que de l’écriture. Mais je découvre avec ce projet l’addiction à l’écriture (en plus de l’addiction à la nage !).

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En plus d’être un lieu sportif, les piscines municipales sont-elles tout de même des lieux de vie de partage ?

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Les piscines municipales sont des lieux de vie « en commun », c’est aussi ce qui fait leur charme. J’aime particulièrement les micro-interactions qu’on peut y avoir avec toutes celles et ceux qui s’y trouvent : les nageurs et les nageuses bien sûr, mais aussi le personnel à l’accueil, les MNS au bord du bassin… Toutes ces interactions donnent une teinte à la piscine, plus ou moins chaleureuse, sympathique, sportive…

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Piscine Rouvet

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Avez-vous pu rencontrer et échanger avec d’autres passionnés de piscines parisiennes ?

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Oui ! J’ai rencontré Colombe Schneck, qui a publié un livre sur les piscines parisiennes (« Paris à la nage », illustré par sa sœur Marine Schneck). Notre conversation ressemblait à un échange entre deux nerds passionnées de piscines qui, enfin, tombaient sur quelqu’un qui partageait la même obsession. J’échange aussi par écrit avec des gens comme @le_pediluve, qui s’était lancée dans cette tournée des piscines parisiennes bien avant Colombe Schneck et moi ! Il y a aussi cet architecte de l’agence BVL architecture, Arnaud Bouët, ancien joueur olympique de water-polo qui a notamment rénové la piscine Blomet ; j’ai adoré constater qu’il connaissait très bien de nombreuses piscines parisiennes et qu’il y était très attaché.

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Les visites des piscines vous permettent de raconter les histoires de grands nageurs. Est-ce que ce sont toujours des récits touchants à étudier ?

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Oui, toujours ! Ne serait-ce parce que tous les gens dont je parle partagent cette passion pour la nage et l’eau. J’adore, par exemple, découvrir comment ils y sont arrivés. Les archives de presses que je trouve sur le site Retronews sont fascinantes, c’est une tout autre façon d’écrire et de raconter les histoires. Je peux simplement parfois ressentir un peu de frustration quand je manque de matière. Par exemple sur Yvonne Godard, je n’ai aucune information entre la fin des années 1930 et sa mort, en 1975.

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Y’a-t-il une véritable uniformisation des lieux ou y’a-t-il des lieux uniques en leur genre ?

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Il y a de tout ; les piscines récentes ont tendance à beaucoup se ressembler : assez cliniques et très lumineuses. Mais ça, ce n’est que la première impression. Plus on passe du temps dans une piscine, plus on perçoit ce qu’elle a d’unique. À Paris, on a la chance d’avoir une immense variété architecturale, avec des piscines des années 1890, 1920, 1930, 1970, 2020…

Votre passion pour la nage s’est-elle renforcée lors des tests ?

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Je dirais plutôt que ce projet m’a permis d’assumer ma passion pour la nage.

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Y’a-t-il des horaires plus agréables pour profiter des piscines ?

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J’ai tendance à adorer les horaires extrêmes : petit matin, soir au coucher du soleil – c’est valable aussi pour une baignade en mer, n’importe où en fait ! Sinon, il y a des horaires de référence pour moi, être là pile à l’ouverture pour le créneau du midi – ça offre dix à quinze minutes de calme dans le bassin – ou juste avant la fermeture. Et le mercredi, le samedi et le dimanche après-midi : sur ces créneaux-là, les petits bassins fourmillent mais les grands bassins sont souvent assez vides.

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Quels sont vos projets ?

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Comme la nage, la découverte de nouvelles piscines est assez addictive. Donc je suis quasiment sûre de ne pas arrêter une fois que j’aurai fait le tour des bassins parisiens. La banlieue parisienne a l’air de regorger de piscines fascinantes ; et puis il y a toutes les piscines de France, d’Europe, du monde… Je verrai bien si je fais un livre de tout cela !

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