Fluctuat Nec Mergitur (Il [le bateau] est battu par les flots, mais ne sombre pas). La devise latine fait référence à la corporation des Nautes, les armateurs parisiens, à une époque où la Seine était un enjeu essentiel pour le commerce et la ville. Quand Paris était encore Lutèce.
Paris a une histoire, une très longue histoire, une identité nourrie par de nombreuses influences et une place incontournable dans le monde en étant notamment une des villes les plus visitées. La capitale française n’a pas fini d’être un lieu à part entière.
Le blog Histoires de Paris retrace à sa façon les lieux emblématiques ou encore les métiers qui rythmaient la vie quotidienne de Paris au fil des siècles. Entretien.
Paris est une ville étudiée, réétudiée, analysée,… Comment est venue votre idée d' »Histoires de Paris » ?
Vous avez totalement raison. Au-delà de son histoire très largement étudiée au niveau universitaire, elle inspire de très nombreuses initiatives passées comme présentes. Il nous suffit de voir le nombre de livres, de film, d’animations, de visites, de conférences, de blog… qui trouvent un large public. Derrière cette grande diversité, se déroule une multitude d’approches, souvent ressemblantes, mais avec un regard propre.
Pour ce qui me concerne, j’ai voulu partir à la découverte de ma propre ville, de ses lieux, de ses temps, des équilibres et tendances qui l’ont façonnée. Sur le chemin, j’ai découvert une histoire qui ne me parlait pas et que je ne connaissais pas. Ces histoires ne correspondaient pas à ce que j’ai entendu, moi-même issu d’une famille parisienne, depuis mon plus jeune âge, à la maison, dans la rue, à l’école. J’ai voulu en savoir plus ! Un peu pour voir ce qui se cachait derrière l’histoire « officielle », tout de moins largement diffusée.
Est-ce l’inspiration de l’histoire des mentalités plutôt que la grande Histoire qui a été privilégiée ?
Comme beaucoup, il ne me semble pas que la grande Histoire comme vous dites soit suffisante. Explique-t-elle à elle seule les évolutions de notre monde et notre ville ?
Alors, comme beaucoup, j’essaie d’assembler diverses pièces d’un grand puzzle qui me dépasse largement mais qui est passionnant. Alors, évidemment, je regarde l’histoire des mentalités mais aussi celle des enjeux et ambitions qui ont poussés les grands érudits du passé à organiser leurs récits. Pour cela, j’ai voulu repartir de lieux, de moments, de corporations, d’organisations sociales, d’évènements, de manifestations culturelles et artistiques…
Je ne suis pas historien et ne le revendique pas. Je ne dispose pas de cette formation et donc du recul scientifique nécessaire. Mais en revanche, l’intérêt et la passion me guident, tout en me permettant d’avoir un autre regard.
Chaque arrondissement, chaque quartier, chaque rue ont eu leur propre corps de métier. Que révèle chaque siècle de l’histoire de Paris des travailleuses et des travailleurs ?
Il me semble qu’ils révèlent l’évolution de leur société tout d’abord : constitution des corporations, relations avec leurs voisines, extensions, déménagement, fin… Ensuite, ils peuvent révéler l’évolution de l’utilisation de l’espace par ces communautés. On peut y voir, par exemple, dans le temps, l’étalement de la ville, partant du centre et allant toujours davantage vers la périphérie.
En quoi le Moyen Age a-t-il été un tournant pour Paris ?
C’est au Haut Moyen Age que Paris est devenue capitale d’un pays. D’ailleurs, l’architecture de Notre Dame de Paris et ses portails montrent bien l’héritage royal avec Childéric, fils de Clovis et roi mérovingien au VIe siècle, face à l’évêque de la ville.
Les siècles suivants ont vu le développement et l’émergence progressive de la puissance de la ville.
Versailles est-il le seul territoire à avoir vraiment affronté Paris ?
Le privilège du Soleil est d’éclipser les autres astres. Tout d’abord, les plus anciens ! En effet, à partir de la seconde partie de la guerre de 100 ans et en raison du parti pris des parisiens pour les bourguignons, les rois ont fuit Paris, de Charles VII, au début du XVe siècle, à Henri II, dans la moitié du XVIe siècle. Le développement de la ville a pâti de cette absence.
Sous le règne de Louis XIV et ses successeurs, Paris est restée la capitale de la France et a largement profité du développement et la puissance du pays alors. Sous cet aspect, Versailles a contribué à la magnificence de Paris.
Ensuite, au XIXe siècle, la capitale française a été dépassée par Londres, puis par Berlin… Aujourd’hui, son influence globale reste mesurée face aux mégalopoles mondiales. D’ailleurs, la plus grande ville francophone est dorénavant Kinshasa, en République Démocratique du Congo.
En tout état de cause, Paris reste une ville monde et attire, de nombreux horizons, touristes, étudiants, talents… qui s’y donnent rendez vous. A nous de profiter de cette incroyable situation !
La Révolution française est profondément ancrée dans l’Histoire de Paris. Les clubs et factions ont-ils réorganisés les territoires de Paris ?
Je me suis pour le moment intéressé sur les clubs révolutionnaires de 1848 très brièvement. Toutefois, je ne suis pas allé au-delà pour le moment.
Quelle balade parisienne est-elle la plus surprenante selon vous ?
Probablement la montée vers Belleville, avec une vue imprenable et magique en haut du parc et son belvédère, pour ensuite redescendre dans les rues à la découverte des réservoirs d’eau, vestiges d’une des approvisionnements en eau de la ville.
Avec le centenaire de la Grande Guerre, les prochains 150 ans de la Commune ou encore les 50 ans de Mai 68, que peut révéler encore Paris de son Histoire?
Bien que non historien, il me semble que l’Histoire, avant de s’arrêter sur des faits anciens, est d’abord une appréhension à un moment donné du passé, mais également du présent et de l’avenir. Aussi, l’écriture de l’Histoire s’appuie sur les rapports à ces temporalités. Aussi, chaque époque met en avant un récit historique sur cette base. C’est donc, au-delà des éphémérides, une interrogation continue.
Sur cette base, des faits anciens peuvent disparaître des mémoires, y revenir, prendre une place différente… Finalement, interroger notre manière de regarder l’Histoire est en quelque sorte avoir un regard sur le moment et la société dans lesquels nous vivons.
Avec la rubrique Monstres, vous vous évadez de Paris pour étudier les histoires de Province. Que révèlent les monstres de nos territoires ?
Parfaitement ! Avec les monstres, je m’évade de Paris. Il s’agit encore d’une nouvelle balade. Ici la géographie à moins d’importance ! En effet, c’est plus un souhait de découvrir des composantes symboliques. Les monstres, éléments phare de l’imaginaire, en sont un cadre merveilleux. Pour ce faire, je m’intéresse, pour commencer, bien évidemment à la mythologie, mais aussi aux contes et légendes. Cela peut m’amener dans différentes régions de France, mais aussi d’Europe et du Monde. J’avance à tâtons, progressivement, car le sujet est bien plus complexe.
L’Histoire des banlieues mérite-elle selon vous d’être contée ?
Je ne suis pas forcément mieux placé pour déterminer si elle mérite d’être contée. Toutefois, il me semble que regarder les histoires des lieux qui hébergent 90% de l’agglomération parisienne peut avoir du sens. La dynamique globale parisienne se situe à cette échelle et pas uniquement sur un territoire figé depuis le milieu du XIXe siècle pour des raisons institutionnelles et bloqué par le boulevard périphérique.
Cependant, le temps disponible est conté et je n’ai pu que de manière trop parcellaire regarder à cette échelle pour l’instant.
Quels sont les projets d' »Histoires de Paris » ?
Tout d’abord, continuer à me balader et me laisser conduire par mes pas et mes découvertes. C’est l’ambition principale de ce blog.
Pour 2018, je souhaite pouvoir associer à mes approches d’autres regards. Comme je le disais plus tôt, nous sommes très nombreux à nous intéresser à ces sujets et à proposer des articles, des visites… Ce format est ouvert et à construire. Toute proposition pouvant aller dans ce sens m’intéresse. N’hésitez pas à prendre contact avec moi directement sur le blog : histoires-de-paris.fr, sur twitter : https://twitter.com/Histoires2Paris ou sur Facebook : https://www.facebook.com/histoires2paris/
